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Dans le monde
Tortionnaires syriens condamnés : la bonne conscience occidentale
Trois dirigeants du régime de Bachar al-Assad, jugés en leur absence, ont été condamnés le 24 mai à la réclusion à perpétuité par la justice française pour la mort sous la torture de deux Franco- Syriens.
Mazzen et Patrick Dabbagh, un père et son fils, possédant la double nationalité française et syrienne, furent arrêtés en novembre 2013 à Damas, emmenés à l’aéroport militaire de Mazzeh, siège des Renseignements de l’armée de l’air, et déclarés morts en 2018. On comprend que nombre de familles de Syriens torturés ou disparus aient à cœur de voir des tortionnaires du régime syrien condamnés, même symboliquement. Mais les déclarations des représentants de l’État français et des médias vantant la démocratie française, prétendument soucieuse des droits de l’homme, ont de quoi révolter.
Dans le passé en effet, les dirigeants impérialistes n’ont pas toujours condamné le régime dictatorial des Assad, père puis fils. Il leur fut même souvent utile, comme en 1991, lorsque Hafez al-Assad, le père du président syrien actuel, s’engagea aux côtés des États-Unis et de la France contre l’Irak de Saddam Hussein. L’attitude de la France, puissance mandataire de la Syrie entre 1920 et 1941, ne cessa d’osciller entre des périodes de rapprochement et d’autres de froid diplomatique n’empêchant pas la collaboration avec le régime syrien. Chirac fut même le seul dirigeant occidental à se déplacer aux funérailles d’Hafez al-Assad en 2000.
En 2011, les dirigeants impérialistes ont espéré que le mouvement de contestation né contre le régime leur donne une occasion d’asseoir davantage leur domination sur la région, en les débarrassant d’un dirigeant jugé peu fiable de leur point de vue. Après avoir laissé le régime réprimer férocement les manifestations, les dirigeants des États-Unis ont préféré s’appuyer sur des milices armées en guerre contre Assad, directement et indirectement par l’intermédiaire de leurs alliés régionaux. La France a fait de même en soutenant le groupe djihadiste al-Nosra, lié à al- Qaida, qui « faisait du bon boulot », selon l’expression utilisée en 2012 par le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius. Puis, en 2014, quand la guerre contre Daech devint une priorité, tous finirent par miser sur le maintien de Bachar al-Assad, avec le soutien de la Russie. Condamné en paroles pour ses exactions et ses bombardements, Assad devenait un moindre mal, à défaut pour les dirigeants impérialistes de trouver un interlocuteur plus fiable que lui.
Les dirigeants impérialistes continuent de mener ce jeu cynique qui entretient l’instabilité de la région, sans se soucier du sort des populations, des emprisonnés, des torturés, des affamés qui en sont les victimes. Quelques condamnations symboliques par les tribunaux français ne peuvent le faire oublier.