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Dans le monde
Les Tupamaros, du fusil au bulletin de vote
Les Tupamaros est le nom familier du Mouvement de libération nationale-Tupamaros (MLN-T). Il dérive du nom de Tupac Amaru, nom repris en 1780 par un descendant de ce chef inca, assassiné par les Espagnols en 1572, pour conduire une révolte contre la domination espagnole.
Le MLN-T émergea de l'échec électoral de la gauche uruguayenne en 1962, où les deux listes (l'une influencée par le PC, l'autre par le PS) obtinrent moins de 6 % des voix au total. Le succès de la révolution cubaine combiné avec la crainte d'un coup d'État militaire en 1964 poussa des militants de différentes origines (Jeunesses socialistes, PC, maoïstes ou anarchistes) à s'orienter alors vers la lutte armée. Mais les Tupamaros ne prirent pas le maquis pour entraîner des paysans, ils choisirent de harceler les autorités dans les villes.
À leurs débuts, ils volaient de l'argent pour s'armer ou détournaient des camions de nourriture redistribuée dans les quartiers pauvres, ce qui leur valut une réelle popularité. Il leur arriva aussi de s'introduire dans des banques pour y dérober des preuves de la corruption de certains notables, transmises ensuite à un juge pour que des poursuites soient engagées.
En 1968, le gouvernement décréta le gel des prix et des salaires, s'attaqua aux syndicats et aux organisations étudiantes. La loi martiale fut proclamée, un étudiant fut tué et le mécontentement populaire grandit. Le MLN-T intensifia alors son action. En 1969, il s'empara pour quelques heures d'une ville de 20 000 habitants. En 1970, il enlevait un agent du FBI (c'est l'épisode évoqué par Costa-Gavras dans le film État de siège) puis en 1971, l'ambassadeur de Grande-Bretagne, qui paya pour sa libération. La même année, le MLN-T parvint à faire évader 111 prisonniers politiques, y compris son dirigeant Raul Sendic (décédé en 1989).
La répression monta alors d'un cran et la plupart des dirigeants furent arrêtés. L'appel à un cessez-le-feu et à participer à des élections en rejoignant le Front élargi ne parvint pas à enrayer leur déclin.
En novembre 1973, bien que la situation soit redevenue plus calme, l'armée s'emparait du pouvoir. La répression frappa aussi bien en Uruguay qu'à l'extérieur du pays, où des militants exilés furent kidnappés, ramenés au pays et assassinés. Les dirigeants du MLN-T furent longuement torturés.
La dictature allait durer jusqu'à ce que, en 1984, la population montre son rejet de la dictature militaire en descendant dans la rue. En 1985, l'armée organisa un « retour à la démocratie » assorti de l'impunité pour ses crimes et ceux des Tupamaros.
À leur libération, Sendic et Mugica militèrent pour le retour à la voie électorale en formant le MPP (Mouvement pour une participation populaire) qui entra dans le Front élargi. En 1990, cette coalition prit la tête de la municipalité de la capitale Montevideo. Par la suite, Mugica fut élu député puis sénateur. En 2005, il devint ministre de l'Agriculture quand l'ancien maire de Montevideo, Tabaré Vasquez, devint le premier président de centre-gauche d'Uruguay. En même temps, le MPP devenait le parti le plus influent au sein du Front.