Jean-Pierre Mercier : “Il faut un parti communiste révolutionnaire implanté dans la classe ouvrière”12/10/20222022Journal/medias/journalarticle/images/2022/10/P7_2022_10_08_Mutu_02_C_LO.jpg.420x236_q85_box-0%2C31%2C600%2C369_crop_detail.jpg

meeting du 8 octobre

Jean-Pierre Mercier : “Il faut un parti communiste révolutionnaire implanté dans la classe ouvrière”

Le 8 octobre, à la Maison de la Mutualité à Paris, pour le meeting de Lutte ouvrière, plus de mille personnes enthousiastes sont venues écouter les interventions de nos camarades Nathalie Arthaud et Jean-Pierre Mercier, dont nous publions ici des extraits.

Illustration - “Il faut un parti communiste révolutionnaire implanté dans la classe ouvrière”

Le mouvement communiste révolutionnaire dont nous nous réclamons se distingue de tous les autres courants politiques en ce sens que nous sommes marxistes : c’est-à-dire tout d’abord que nous sommes convaincus que toutes les oppressions et les catastrophes actuelles ne pourront être supprimées sans renverser le capitalisme.

Et d’autre part que la seule classe sociale qui a la capacité de le faire, c’est la classe ouvrière. La fin du capitalisme ne peut venir que d’une révolution dont les travailleurs seront le moteur et la direction politique.

Comme l’a écrit Marx voilà bientôt deux siècles, à l’époque où le capitalisme n’était encore que naissant, les capitalistes, en développant les usines et en jetant des millions de travailleurs dans l’esclavage salarié, ont fabriqué « leurs propres fossoyeurs », une classe de prolétaires qui, en renversant le capitalisme, n’ont « rien d’autre à perdre que leurs chaînes ».

Depuis Marx, le capitalisme a étendu ses tentacules sur l’ensemble de la planète et la classe ouvrière est 100 fois, 1 000 fois plus nombreuse que lorsque fut rédigé le Manifeste du Parti communiste. Il y a des luttes en permanence, quand ce n’est pas dans un pays, c’est dans un autre. Mais cela fait bien longtemps que la classe ouvrière ne s’est pas battue sur le terrain politique, en tant que classe porteuse d’une organisation sociale supérieure au capitalisme. […]

Un véritable parti révolutionnaire devra avoir, demain, des militants et des relais dans toutes les entreprises du pays, je dirais même, dans toutes les catégories sociales qui composent le monde du travail.

Mais ce qui sera fondamental, c’est d’être présent au sein des grandes entreprises, parce que ce sont elles qui ont un poids sur la vie politique, économique et sociale sans commune mesure avec les autres.

Militer dans les grandes entreprises

Nous le savons, une grève peut partir de petites entreprises. Mais c’est seulement lorsqu’elle s’étend à des géants comme Renault, PSA-Stellantis, Total, Sanofi, Arcelor-Mittal, Safran, que la grève devient un événement social et politique incontournable.

Des milliers de travailleurs en grève dans une grande usine, cela veut dire des milliers de militants de la grève, des milliers de femmes et d’hommes susceptibles d’aller s’adresser aux travailleurs des autres entreprises du secteur, de diffuser la grève en militant pour elle auprès de leurs proches, de leur famille, de leurs voisins. C’est une force de frappe considérable, et cela ne pourra jamais exister à l’échelle d’une entreprise qui ne regroupe que quelques dizaines de salariés, quelle que soit leur combativité. […]

Alors oui, pour nous, il est vital, indispensable, que des militants révolutionnaires soient présents dans les grandes entreprises, et c’est l’orientation fondamentale de Lutte ouvrière depuis que notre organisation existe.

Parce qu’il faut, dans ces citadelles du capitalisme, des militants capables de donner des perspectives à leurs camarades, capables de leur expliquer « la science de leur malheur », comme disait le syndicaliste révolutionnaire Fernand Pelloutier à la fin du 19e siècle, capables de les éclairer sur les rouages du capitalisme, de son État, de son système politique, de leur apporter des réponses politiques sur la crise de son économie.

Oui, si l’on veut changer la société, il faut implanter les idées du communisme révolutionnaire dans les entreprises, et en particulier dans les plus grandes car c’est ainsi qu’elles irrigueront l’ensemble des travailleurs et iront jusqu’aux plus isolés dans les plus petites entreprises.

Alors, c’est une tâche difficile, compliquée, oui c’est vrai. Parce que nous ne sommes pas les seuls à savoir combien la présence de militants révolutionnaires dans les entreprises sera déterminante.

Les patrons, et derrière eux tout l’appareil de l’État bourgeois, le savent aussi bien que nous, et c’est pour cette raison qu’ils mettent toute leur énergie à l’empêcher.

C’est pour cette raison, et pour aucune autre, qu’il est interdit de faire de la politique dans les entreprises. Ce pays est peut-être une démocratie, mais cette démocratie s’arrête à la porte des entreprises. Il y a beau être écrit « Liberté, égalité, fraternité » au fronton des mairies et des écoles – et nous savons tous combien cette formule est, au fond, vide de sens dans la société capitaliste – elle n’est en revanche pas écrite au fronton des usines : le cynisme de la société capitaliste ne va pas jusque-là, il ne faut quand même pas exagérer.

La grève, un moment de liberté

Le seul moment où la liberté peut régner dans une entreprise, c’est pendant une grève.

Lors de la grève de quatre mois contre la fermeture de l’usine de PSA Aulnay, en 2013, tous les grévistes ont ressenti ce sentiment incroyable que nous étions enfin libres. Pendant la grève, l’usine était ouverte à tous, y compris à la presse (ce qui n’est pas le cas le reste du temps), c’étaient les chefs qui baissaient les yeux et les directeurs qui se cachaient, c’était nous qui décidions des horaires, des lieux et des moments où nous nous réunissions, nous qui organisions les rondes de surveillance contre les jaunes, les chefs et les huissiers. Pendant la grève, les discussions étaient libres, les idées politiques entraient dans l’usine, chacun avait le droit d’exprimer ses idées, quelles qu’elles soient, sans avoir à craindre d’être dénoncé par un mouchard ou par un chef… […]

Les patrons et leurs ribambelles de chefs, de contremaîtres et de directeurs font leur travail. Eh bien, à nous, militants, de faire le nôtre !

À nous de nous montrer plus malins, plus inventifs, plus déterminés, pour nous permettre de nous exprimer politiquement dans les entreprises, pour permettre aux travailleurs de faire de la politique malgré l’interdiction et la répression patronale !

C’est la raison pour laquelle, par exemple, nous cherchons à éditer, partout où nous sommes, une presse d’entreprise, ce que nous appelons nos « bulletins ». Oh ! certes, c’est une presse modeste : la plupart du temps, une simple feuille quinzomadaire avec, au recto un éditorial politique et au verso une série de petits articles dénonçant ce qui se passe dans l’entreprise du point de vue communiste révolutionnaire.

Mais même modeste, il s’agit bien d’un journal politique qui entre et qui circule dans les entreprises par tous les moyens possibles, en contournant toutes les interdictions mises en place par les patrons pour tenter de les empêcher.

C’est une petite brèche que nous ouvrons dans la dictature patronale mais surtout une possibilité aux militants de s’entourer de travailleurs, de les organiser, de constituer un réseau dans l’entreprise autour de la diffusion des idées communistes révolutionnaires, à la barbe du patron.

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