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SNCF − Technicentre de Châtillon : la colère et la détermination
Le technicentre de Châtillon, où sont entretenus les TGV Atlantique, fonctionne 24 heures sur 24, sept jours sur sept avec 700 cheminots et 200 sous-traitants. Depuis lundi 21 octobre, les 170 cheminots de Service court, chargés de la maintenance rapide des rames, ont « déposé la caisse », autrement dit ont cessé le travail. Ils ont rapidement été rejoints par les 80 jockeys, chargés du déplacement des rames sur le site.
Dès la présentation des nouveaux roulements concoctés par la direction, début octobre, cela a été le tollé. Réduction de 144 à 132 repos, augmentation de 50 % du nombre de nuits, réduction du temps de repos en week-end, des jours de service de 9 heures, des changements d’horaires 48 heures à l’avance… À tout cela, la réaction des cheminots était : avec de tels roulements, nous n’arriverons pas à la retraite, nous serons morts avant !
Dès lundi 7 octobre, 25 cheminots de Service court se réunissaient à 13 heures à leur prise de service et 30 autres en début de nuit. Ils décidaient de préparer la riposte.
Le 10 octobre, le directeur d’établissement, inquiet, proposait alors une prime de 5 000 euros pour compenser le passage de 144 repos à 132, tentant à la fois d’acheter et de diviser les cheminots. La réponse venait le soir même. À l’assemblée générale de nuit, les 40 présents répondaient « nous ne sommes pas à vendre ». À toutes les assemblées, ce fut la même réaction. Le mouvement se renforçait de jour en jour, avec le renfort de jockeys, menacés par les mêmes roulements. Une DCI, demande de concertation immédiate, étape avant le dépôt d’un préavis de grève, était déposée.
Le 18 octobre, à la concertation, 40 agents accompagnaient la délégation composée de cheminots des différents services, syndiqués ou non. Le directeur refusait de maintenir les 144 repos, mais proposait cette fois… 7 000 euros, prouvant à la fois que, s’il ne comprenait rien, il avait de l’argent sous le coude !
Lundi 21, l’équipe de nuit décidait de poser la caisse et de faire venir le directeur en pleine nuit. Elle entraînait les jockeys, convaincus par le nombre. Les vidéos du directeur, la barbe en bataille et la mine déconfite face aux grévistes, tournèrent sur WhatsApp. Les équipes du matin posèrent la caisse à leur tour. Et ainsi de suite pour les équipes successives. Pratiquement, depuis mardi 22, aucun cheminot ne travaillait plus dans tout le secteur mais tous viennent à chaque prise de service, participent aux assemblées, souvent restent aux ateliers et y dorment parfois.
Dès mercredi 23, faute de trains, la SNCF a commencé à supprimer les réservations puis les trains eux-mêmes au départ de la gare Montparnasse. Comme le disait un ouvrier, « on me dit que les cheminots ne font rien, mais dès qu’on s’arrête, cela se voit drôlement. »
En catastrophe, la direction proposait alors de ne supprimer les 144 repos que pour les nouveaux entrants. De nouveau, le refus fut unanime devant cette tentative de division.
Jeudi 24, elle transmettait un texte renonçant à imposer les nouveaux roulements à qui que ce soit, à Service court et chez les jockeys, s’engageait à maintenir les 144 repos et à ne prendre aucune sanction disciplinaire. Elle proposait de retenir les heures non travaillées sous forme de grève et non d’absences irrégulières.
C’était un recul important, montrant sa crainte devant la détermination du mouvement, alors que la situation est aussi explosive dans bien des secteurs. Mais les cheminots n’obtenaient que le retour à la situation initiale et n’ont aucune raison de payer pour un conflit dont la direction est entièrement responsable. Les grévistes exigent avant de reprendre le travail qu’il n’y ait aucune retenue financière et le versement d’une prime de 3 000 euros. Jusqu’à présent, la direction préfère couler les trains et perdre des dizaines de millions d’euros plutôt que de céder. Le combat continue.