Sarkozy et les agriculteurs : Du fourrage... pour les banques ?10/03/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/03/une2171.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Sarkozy et les agriculteurs : Du fourrage... pour les banques ?

Cette année, peut-être plus encore que les précédentes étant donné la proximité du premier tour des élections régionales, le petit monde des représentants des partis de gouvernement n'aurait pour rien au monde manqué le rendez-vous du salon de l'Agriculture.

Comme d'habitude, Chirac, même retraité, semble l'avoir emporté à l'applaudimètre parmi les exposants de ce salon. Cela bien que, de Villepin à Fillon, Villiers, Le Pen, Bayrou et quelques autres, la concurrence ait été rude parmi les gens de droite pour se montrer empressé auprès d'un monde agricole, qui passe pour plutôt favorable à la droite, et qui voit ses revenus reculer.

Sarkozy a, lui, fait figure d'exception en choisissant de n'aller se montrer à ce salon que le dernier jour, et en coup de vent. On se souvient comment, il y a deux ans, le « casse-toi, pauvre c... » qu'il avait alors lancé à un contradicteur avait fait le tour du pays, et choqué une bonne partie de l'opinion.

Les revenus des paysans, après avoir reculé en moyenne de 20 % en 2008, ont encore baissé de 30 % en 2009. Cette année, le président n'est donc allé qu'à reculons visiter la « plus grande ferme de France ». Il faut dire que sa cote de popularité, bien qu'elle soit moins basse dans les campagnes qu'ailleurs, y a tout de même perdu 9 points depuis novembre, selon l'institut Ifop.

Il a donc d'abord envoyé en estafette son ministre de l'Agriculture, puis son Premier ministre, chargés de déminer le terrain. Et dernière précaution pour contrer d'éventuels manifestants, Sarkozy a avancé d'une heure sa visite éclair. Juste le temps, c'était le principal, pour que les télés le montrent dans les allées du salon. Et pour qu'il y lance sa petite phrase - élections obligent - sur le nécessaire « changement de méthode dans la mise en oeuvre de mesures environnementales en agriculture ». Une promesse censée mettre du baume au coeur des électeurs ruraux qui vient après celles, vertes et destinées à un autre public, du « Grenelle de l'environnement » ! Ce qu'il résultera des unes et des autres - et l'on sait depuis La Fontaine que « tout flatteur vit au dépens de celui qui l'écoute » - est évidemment une tout autre question.

Bien sûr, il y a aussi une annonce faite par Sarkozy à ce salon : celle de 800 millions de prêts bonifiés supplémentaires, outre les 50 autres millions destinés aux paysans les plus endettés. Mais il en ressort surtout que ce que le gouvernement présente comme une aide aux agriculteurs en difficulté consiste à les « aider »... à s'endetter ou à rembourser les prêts qu'ils ont déjà contractés auprès des banques, des crédits qui étranglent nombre d'entre eux.

Encore et toujours, ce sont donc les banques qu'aident le président et son gouvernement. Et quand Sarkozy feint de s'en prendre aux responsables de la dégradation du niveau de vie des agriculteurs, il botte en touche. Pas question de rappeler que les revenus des géants de la distribution ou de ceux des grands firmes de l'agro-alimentaire, eux, non seulement n'ont pas reculé, comme ceux des producteurs agricoles, mais que, au contraire, leurs marges se sont accrues. Non, quand il cherche un coupable, Sarkozy ressort un vieux truc : il montre du doigt l'étranger, en affirmant que la politique de l'Union européenne ferait preuve d'un « déficit de préférence communautaire » en matière agricole. Une formule alambiquée destinée à faire oublier aux agriculteurs que les responsables de leurs problèmes ne sont pas si éloignés qu'on cherche à leur faire croire...

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