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Dans le monde
Islande : Référendum sur le paiement de la dette
Payer pour les banquiers faillis, non merci !
Samedi 6 mars, à l'occasion d'un référendum, les électeurs islandais ont refusé à 93 % de rembourser les 3,8 milliards d'euros de dette résultant de la faillite de la banque Icesave.
Lors de la faillite du système financier islandais, pendant le krach général de l'automne 2008, plusieurs centaines de milliers de déposants britanniques et néerlandais avaient tenté en vain de récupérer leurs avoirs placés chez Icesave, filiale britannique d'une banque islandaise. Craignant les faillites en chaîne, les États de ces deux derniers pays avaient alors partiellement remboursé ces rentiers malheureux et ces spéculateurs en herbe, puis s'étaient retournés contre l'État islandais pour se faire rembourser à leur tour, le menaçant de toutes les représailles possibles, s'il ne payait pas. La banque Icesave, nationalisée de fait avec toutes les banques islandaises en déroute, étant évidemment insolvable et l'État islandais se trouvant en faillite, le gouvernement n'avait alors rien trouvé de mieux que d'exiger que chaque Islandais s'acquitte d'une partie de la dette de cette banque, soit 12 000 euros par personne. On pouvait étaler les paiements, moyennant un intérêt de 5,5 %... Devant les protestations de la population, le président de la République avait finalement accepté d'organiser le référendum du 6 mars.
La dette de Icesave n'est que la partie émergée de l'iceberg, car la faillite des banques islandaises a entraîné la ruine de l'État, l'arrêt de pans entiers de l'économie, la mise au chômage de 10 % de la population, en plus du licenciement des ouvriers immigrés, et l'impossibilité pour tous les ménages endettés de faire face à leurs échéances. En plus de la baisse de leurs revenus, ces derniers subissent en effet une augmentation du montant de leurs traites, car leurs dettes étaient à taux variables, en fonction du cours de la monnaie islandaise... qui a perdu 60 % de sa valeur. Ils doivent désormais bien plus que la valeur des biens acquis avec leurs emprunts !
Dans les années précédant le krach financier, l'Islande était devenue un paradis pour spéculateurs, un concentré de l'économie de casino qui prévaut dans le monde entier. Outre la déréglementation générale des marchés financiers, les banquiers islandais bénéficiaient alors de lois particulièrement favorables et d'institutions, gouvernement et banque centrale, prêtes à fermer les yeux sur tous leurs montages. Les banques islandaises ont ainsi pu s'engager pour des montants équivalant à neuf fois la richesse produite par le pays en un an et spéculer avec des capitaux dont elles ne possédaient pas la plus petite partie. Elles ont aussi pu attirer des centaines de milliers d'épargnants britanniques, petits et gros, en leur promettant des taux d'intérêt records qu'elles ne pouvaient servir qu'en lançant de nouveaux emprunts.
Quelques fortunes spectaculaires sont ainsi apparues et on a pu voir des « Vikings de la finance » bâtir rapidement des fortunes colossales. Mais ils ont perdu à ce jeu face à des capitalistes beaucoup plus gros qu'eux qui, dès avant le krach de septembre 2008, avaient parié sur l'insolvabilité de l'Islande, comme ils le font actuellement sur celle de la Grèce.
Si les banquiers islandais et leurs complices ministres et hauts fonctionnaires n'ont pas été inquiétés et coulent toujours des jours heureux, les pots cassés sont entièrement à la charge de la population. Un ministre islandais l'expliquait assez crûment : « Partout dans le monde, c'est l'argent du contribuable qui sauve le système financier. La différence, c'est qu'avec le référendum le peuple peut s'exprimer. Mais un non gagnant laisserait entier le problème. »
En effet, il ne suffit pas que la population donne son opinion. Encore faudra-t-il qu'elle la fasse prévaloir en forçant les responsables à payer. Et pas seulement en Islande.