Algérie : la population du sud mobilisée contre l’exploitation du gaz de schiste04/03/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/03/2431.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Algérie : la population du sud mobilisée contre l’exploitation du gaz de schiste

Samedi 28 février, des affrontements ont une nouvelle fois eu lieu entre les forces de l’ordre algériennes et les habitants d’In Salah, oasis de 30 000 habitants dans le Sahara, mobilisés depuis deux mois contre les forages de gaz de schiste.

Cette ville manque de tout, de services publics comme de travail pour les jeunes. Il faut faire des centaines de kilomètres dans le désert, jusqu’aux villes voisines de Tamanrasset et d’Adrar, pour trouver un médecin spécialiste. La population pauvre survit de petite agriculture, d’élevage et de travaux précaires. Avoir un accès à l’eau est vital pour eux. Les eaux souterraines ne manquent pas, mais elles sont surtout exploitées pour l’industrie, et il en reste peu pour l’irrigation. L’eau qui arrive au robinet est saumâtre, ce qui entraîne diverses maladies.

Or l’extraction du gaz de schiste nécessite de grandes quantités d’eau. Elles seront additionnées de produits chimiques et, vu le contexte, largement rejetées sans contrôle. La pollution des nappes phréatiques risque d’être catastrophique pour la vie dans l’oasis.

À l’annonce des premiers forages, fin décembre, la colère avait éclaté. Depuis le 1er janvier, manifestations, barrages, sit-in se succèdent quotidiennement et mobilisent des milliers de personnes déterminées à obtenir l’arrêt immédiat des opérations. Le mouvement s’est étendu à d’autres oasis du Sud algérien concernées aussi par le problème.

Le pouvoir a répondu par la répression, mais ni les matraques, ni l’intervention du président Bouteflika, déclarant que le pétrole et le gaz de schiste étaient des « dons de Dieu » qu’il fallait faire fructifier, n’ont entamé la détermination des manifestants. Les habitants d’In Salah, d’où on a extrait des quantités colossales de gaz depuis soixante ans, sont bien placés pour savoir que la manne pétrolière ne leur profitera pas. Mais elle profitera à coup sûr aux trusts du pétrole, l’américain Halliburton, le norvégien Statoil ou encore le français Total, à qui l’État algérien vient d’attribuer des contrats d’exploitation.

Les habitants gardent en mémoire les essais nucléaires du Sahara, qui ont permis à la France de mettre au point sa bombe atomique, il y a cinquante ans, et qui sont encore un problème sanitaire aujourd’hui. Ils savent aussi que l’oasis d’Ouargla subit encore les conséquences d’un forage de trop fait par Total en 1978, qui a entraîné un effondrement et une contamination progressive des eaux. Voilà aussi pourquoi ils refusent d’être à nouveau sacrifiés, eux et leurs enfants, pour les profits de la classe dirigeante algérienne et de ses alliés pétroliers.

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