Alliance France-Allemagne : Une amitié indexée sur les cours de la Bourse23/01/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/01/une2321.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Alliance France-Allemagne : Une amitié indexée sur les cours de la Bourse

Les gouvernements allemand et français, les députés des deux pays et les commentateurs autorisés ont tenu à célébrer en grande pompe le cinquantenaire du traité d'amitié franco-allemand. Les discours ont fleuri, brodant à l'infini sur le thème d'une réconciliation exemplaire succédant à trois guerres meurtrières.

Il vaut certes mieux échanger des étudiants que des coups de canon. Pourtant, les rivalités qui avaient engendré les guerres entre la France et l'Allemagne n'ont pas disparu. Elles sont toujours inscrites dans la concurrence que se font les groupes industriels et financiers des deux pays, dans l'existence même des deux États, voués chacun à la défense exclusive de sa bourgeoisie nationale.

Le partage des marchés et des profits entre les deux puissances du continent s'est réglé de façon différente suivant les époques : de la concurrence commerciale à la guerre ouverte, de l'occupation et du pillage de l'un par l'autre, alternativement, à la tentative, depuis plus de cinquante ans maintenant, d'accorder leurs violons. Encore les vieux réflexes et les intérêts anciens ne sont-ils jamais loin : pendant les guerres qui virent l'explosion de la Yougoslavie il y a vingt ans, l'Allemagne penchait pour la Croatie quand la France soutenait la Serbie. Et ces appuis contradictoires ne furent pas pour rien dans le déclenchement, le déroulement et les résultats de cette guerre.

L'alliance franco-allemande est néanmoins restée, comme le répètent politiques et journalistes, l'axe de la construction européenne, ne serait-ce que parce que ces deux pays sont les plus grands, les plus peuplés et, surtout, les plus riches de la zone euro. Leurs groupes financiers et industriels respectifs y ont gagné un marché élargi et une puissance accrue.

France et Allemagne, comme les autres pays européens, ont cependant été incapables d'aller plus loin que cette union commerciale et monétaire. L'accélération de la crise financière, en 2008, puis la récession économique en cours montrent chaque jour la fragilité de l'édifice. Quelles que soient leurs protestations d'unité, chacun des États a secouru ses propres banquiers en 2008 et chacun essaie, avant toute chose, de frayer la voie à ses propres trusts. Ce ne sont pas les patrons européens, mais bien les patrons français qui accompagnent Hollande dans ses voyages. Ce sont les trusts français de l'automobile qui reçoivent subventions, aides, soins de leur État. C'est bien le pré carré français et les approvisionnements du trust français Areva que la troupe défend au Mali.

L'intérêt actuel des grands groupes, les BNP et Deutsche Bank, les Siemens et Alstom, etc. exige un maintien de l'euro et donc de l'alliance franco-allemande. Pour les trusts, les avantages de l'Union européenne et de la monnaie commune, l'euro, l'emportent sur les inconvénients. Les discours de Hollande et Merkel ne sont là que pour accommoder ce simple fait. Mais la crise économique, en s'approfondissant, pourrait modifier le cours des choses, comme elle l'a fait par le passé, dressant de façon plus aiguë les trusts et, par là, les États les uns contre les autres. De l'amitié franco-allemande des bourgeois et de leurs beaux discours, il ne resterait alors plus rien.

En revanche, il subsistera la communauté d'intérêts entre les travailleurs de France et d'Allemagne. Car elle ne se fonde pas, elle, sur les aléas et les variations du taux de profit, mais sur une situation commune d'où découle une nécessité commune : se débarrasser définitivement des frontières, des guerres et de l'exploitation capitaliste.

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