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Leur société
Procès Sarkozy : tels maîtres, tels valets
Sept ans de prison ferme ont été requis contre Sarkozy par les procureurs du Parquet national financier (PNF) jeudi 27 mars. Déjà sous bracelet électronique, il pourrait ainsi être le premier ancien président de la République condamné pour corruption et association de malfaiteurs.
Au terme de douze semaines d’audiences, le PNF est convaincu qu’un pacte de corruption a été signé en 2005 entre le dictateur libyen Kadhafi et Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, qui soignait son image d’homme à poigne, réclamant de « nettoyer les cités au karcher ». Dans la même période, selon les réquisitoires, Claude Guéant et Brice Hortefeux – tous les deux futurs ministres de l’Intérieur de Sarkozy, et eux aussi chantres d’une police et d’une justice intraitables avec les pauvres – jouaient les intermédiaires en mettant en place un mécanisme de financement de plusieurs dizaines de millions d’euros venus de Libye pour la campagne électorale de leur parrain en 2007. Brice Hortefeux encourt trois ans de prison et Claude Guéant, six, car ce dernier aurait reçu, en outre, un demi-million d’euros de la Libye avec lesquels il aurait acheté un appartement dans le 16e arrondissement de Paris. Éric Woerth, comme trésorier de campagne, est menacé d’un an de prison ferme.
L’ampleur de l’affaire est inédite par la qualité des accusés et ses implications. Un procureur s’est exclamé dans son réquisitoire : « C’est un tableau très sombre d’une partie de notre République qui est dessiné. »
Le procès a levé une partie du voile sur le fonctionnement de l’État de la bourgeoisie et les mœurs de son personnel, depuis les politiciens couvrant leurs turpitudes derrière l’« intérêt de la France », jusqu’aux hauts fonctionnaires. Si le palmarès judiciaire de Sarkozy bat des records, il faut reconnaître qu’il n’a pas inventé les actes frauduleux à l’arrière-plan de l’appareil d’État et son utilisation pour les couvrir. De Giscard d’Estaing et ses diamants offerts par un dictateur africain aux valises de la Françafrique arrosant tous les partis, y compris le Parti socialiste de Mitterrand et le Front national de Jean-Marie Le Pen, jusqu’au procès Chirac de 2011, l’histoire de la République est une longue chronique de scandales étouffés ou plus ou moins déballés dans les prétoires.
À propos de Sarkozy, le réquisitoire a dénoncé « l’ambition, la soif de pouvoir, la cupidité. » Ce portrait pourrait convenir à toute la bourgeoisie française, dont Sarkozy s’est fait le fidèle serviteur. L’absence totale de moralité, la duplicité et le mensonge au service d’intérêts personnels, n’est-ce pas ce que la bourgeoisie pratique en grand et tout le temps ? Les politiciens qui la servent ne peuvent être qu’à son image.
Le verdict pour Sarkozy et sa bande ne tombera pas avant plusieurs mois. Même condamné, il n’est pas certain qu’il fasse un seul jour de prison car, d’appel en appel, à 70 ans, il pourrait bien échapper à la fermeté judiciaire qu’il a tant réclamée pour les autres, surtout quand il faisait des incursions médiatisées dans les quartiers populaires.