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- Lutte ouvrière n°2393
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Dans le monde
Irlande : Au nom de Dieu et de la morale des possédants
L'Église catholique, un des piliers de l'État bourgeois irlandais, déléguait jusqu'à une période récente à des congrégations de religieuses l'encadrement et le fonctionnement de prétendus refuges pour jeunes mères célibataires, souvent pauvres. Ces Mother and baby homes étaient en fait des lieux de maltraitance et d'esclavage destinés à enterrer vivantes des jeunes filles « en état de péché » et leurs enfants, à les dissimuler aux yeux de la société bourgeoise bigote. Accessoirement, nombre de ces emmurées fournissaient, leur vie durant, du travail gratuit dans les fameuses « blanchisseries Madeleine », dépeintes en 2002 dans le film « Magdalene Sisters ».
Le scandale mis au jour à Tuam n'est pas un cas unique : d'autres « homes », généralement aux mains de congrégations religieuses, ont été recensés, en dépit de l'influence de l'Église catholique et du silence complice des autorités étatiques dans l'Irlande des années 1920 à 1970, maintenu depuis. Des rapports de l'époque, exhumés avec bien des difficultés par des particuliers à la recherche de leur passé ou de celui d'un proche disparu, attestent du mépris inhumain avec lequel ces enfants étaient traités. La mortalité infantile atteignait 25 ou même 50 % dans certains « homes » et certaines années, d'après des rapports hospitaliers.
À Castlepollard (Meath), à Bessborough (Cork), à Sean Ross Abbey - où fut enfermée Philomena Lee, contrainte d'abandonner son fils à l'adoption d'un couple américain - , à Roscrea (Tipperary), des rapports ont révélé l'existence de tels établissements, ouverts dans les années 1920 ou 1930. Certains ont été ouverts aussi par l'Église protestante et trois autres, parmi ceux répertoriés, par les autorités locales elles-mêmes.
L'inhumanité de ces institutions, auxquelles les victimes survivantes réclament toujours excuses et indemnisations, n'a malheureusement rien à envier à celle des orphelinats écossais fournisseurs de main-d'oeuvre gratuite pour les fermiers ou à celle des autorités françaises qui ont « importé » de force 1 630 enfants réunionnais arrachés à leur famille dans les années cinquante pour travailler dans les fermes creusoises.