Il y a 55 ans : Hiroshima11/08/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/08/une-1674.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Il y a 55 ans : Hiroshima

L'anniversaire, le 6 août, de la destruction de la ville d'Hiroshima par un seul avion, portant une seule bombe, en 1945, à la fin de la guerre entre les USA et le Japon, n'a pas eu droit à beaucoup de place dans la presse.

C'est que cela n'intéresse plus personne : une ville ouvrière car industrielle, 150 000, voire 250 000 hommes, femmes, vieillards et enfants, soit la moitié de la population, volatilisés ou "vitrifiés" comme disent aujourd'hui les militaires. Bien sûr, ces morts ne sont encore rien par rapport à toutes les autres horreurs, toutes plus abominables les unes que les autres, de cette guerre. On avait déjà vu, comme à Dresde en Allemagne, autant de morts en 24 heures par des bombardements avec des bombes incendiaires. On venait d'apprendre, trois mois auparavant, l'horreur absolue des camps d'extermination.

Mais cette bombe et la deuxième qui suivit trois jours plus tard sur la ville de Nagasaki provoquèrent dans le monde entier la stupeur et l'horreur. Il y eut les victimes qui subirent les milliers de degrés du coeur de l'explosion, celles qui furent, bien plus loin, victimes de son énorme souffle, mais surtout toutes celles qui, plus loin encore, n'avaient subi ni le feu ni le souffle et qui moururent immédiatement ou des heures, ou des jours et des mois plus tard, d'atroces brûlures dues à un phénomène invisible : le rayonnement atomique. Sans parler des enfants victimes, des années plus tard, de malformations.

Cette horreur voulait frapper l'opinion et y a réussi. Les dirigeants alliés craignaient que l'effondrement du Japon, que porter la guerre sur son sol ne déconsidèrent l'armée, l'état et l'empereur et ne provoquent une révolution.

L'un des buts, sordides, des USA était de frapper la population de terreur et de permettre à l'empereur et à ses généraux de capituler devant une arme contre laquelle il n'y avait pas de défense possible. Autrement dit plusieurs centaines de milliers de Japonais furent sacrifiés par les dirigeants américains pour sauver Hiro-Hito, le réactionnaire empereur du Japon.

L'autre but, tout aussi sordide, était de démontrer que les USA étaient absolument invincibles et pouvaient mettre à genoux n'importe quel adversaire, dont l'URSS. On ne parlait pas encore de guerre froide mais chacun savait qu'il ne restait, à l'époque, que deux superpuissances.

Alors les volatilisés, les brûlés d'Hiroshima et de Nagasaki ont servi à faire cette démonstration vis-à-vis de l'URSS et du reste du monde.

Depuis, et pendant des années, ce fut une course effrénée aux armements atomiques ; entre les USA et l'URSS mais la Grande-Bretagne, la France et peu à peu bien d'autres s'y engagèrent aussi. Les explosions en plein air montraient qu'on possédait bien l'arme qui passait pour absolue.

Ensuite, ce fut la course aux "vecteurs". D'abord des bombardiers que l'on appelait stratégiques car ils pouvaient, à partir des USA, emmener une bombe en n'importe quel point du globe. Puis ce furent les fusées intercontinentales et cela ne s'arrêta que lorsque trop de pays eurent acquis les mêmes possibilités techniques.

Que d'énergie, que de travail, que d'argent gaspillés, heureusement en pure perte. La population européenne n'était pas encore sortie du retard économique dû à la guerre en Europe. Les pays du Tiers Monde s'enfonçaient dans une misère sans nom.

Tout cela pour maintenir ce qu'on appelait cyniquement "l'équilibre de la terreur" et qui a servi à enrichir les industriels gravitant autour de ces technologies, avec l'argent des états, dont la France, qui se sont endettés et qui, pendant quinze ou vingt ans, ont appauvri leur population.

Et tout cela a commencé au-dessus d'un port japonais, une très belle journée d'été, par ce qui n'était qu'un point lumineux tombé d'un avion et vers lequel des enfants, des femmes, des vieillards levèrent les yeux en ignorant que l'ère de l'énergie atomique allait commencer par un abominable massacre.

(éditorial des bulletins d'entreprise du 7 août)

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