- Accueil
- Lutte ouvrière n°2924
- La Première Guerre mondiale : des rivalités des grandes puissances àla boucherie mondiale
il y a 110 ans
La Première Guerre mondiale : des rivalités des grandes puissances àla boucherie mondiale
Il y a 110 ans, le mois d’août 1914 fut celui de l’entrée en guerre. Les soldats mobilisés rejoignirent par centaines de milliers leur régiment pour ce qui allait être la première grande boucherie mondiale. Celle-ci dura quatre ans et fit 20 millions de morts.
Partout, le mouvement ouvrier avait milité contre cette guerre qui s’annonçait et donné comme perspective aux travailleurs de faire tout pour l’empêcher, voire de se dresser contre leur propre bourgeoisie et de la renverser. Mais en juillet-août, la plupart des dirigeants des grands partis ouvriers renièrent leur parole et une grande partie décidèrent de soutenir la guerre, voire de participer aux gouvernements qui la menaient. En France, Jean Jaurès, qui avait pendant des années dénoncé le militarisme croissant, fut assassiné le 31 juillet 1914. La 2e Internationale, l’Internationale socialiste, connaissait une complète faillite politique.
Rivalités pour le partage du monde
Officiellement, la cause de la guerre fut l’assassinat, à Sarajevo, le 28 juin 1914, de l’archiduc héritier François-Ferdinand d’Autriche et de son épouse sous les balles d’un jeune nationaliste bosniaque de Serbie. Mais cette guerre entre les grandes puissances capitalistes se préparait en fait depuis au moins une dizaine d’années.
Aucune des puissances n’expliqua, bien sûr, son entrée en guerre par l’exacerbation de la lutte pour les débouchés, ni comme visant à s’emparer de territoires, à asservir des nations étrangères et ruiner les concurrents. Chacune prétendit vouloir sauver sa liberté, défendre la justice, la nation face à l’envahisseur.
L’enjeu de la guerre pour les grandes puissances était bien de se partager les zones d’influence, comme cela avait été dénoncé par le mouvement ouvrier bien avant 1914.
La Grande-Bretagne puis la France, s’étant industrialisées les premières, cherchèrent à s’assurer des ressources en matières premières, et à trouver des marchés pour leurs marchandises et leurs capitaux. La colonisation se développa, les puissances anglaise et française se faisant concurrence pour s’approprier des territoires. Quelques années plus tard, les bourgeoisies allemande puis italienne, un peu plus tard venues, cherchèrent à leur tour à participer à la curée.
À partir de 1900, la course à l’armement s’accéléra. Dans chaque pays, la propagande chauvine devint omniprésente. Chacune des quinze années qui précédèrent la Première Guerre mondiale vit des conflits. En Europe centrale, dans les Balkans, où les rivalités entre les puissances capitalistes occidentales contribuaient à dresser les peuples les uns contre les autres, les guerres de 1912 et 1913 constituèrent un premier avertissement.
Répondant à ceux qui prétendaient lutter contre la menace de guerre en se contentant d’appels à la paix, Rosa Luxemburg, militante socialiste en Allemagne, écrivait en 1911 : « Les contradictions internationales des États capitalistes ne sont que l’autre versant des contradictions de classes ; l’anarchie de la politique mondiale n’est que le revers du mode de production anarchique du capitalisme. Les deux ne peuvent que se développer ensemble et être surmontés ensemble. “Un peu d’ordre et de paix” est donc impossible, une utopie petite-bourgeoise plaquée sur le marché capitaliste mondial. »
Les peuples entraînés dans la guerre
Le 28 juillet 1914, l’Autriche-Hongrie déclarait la guerre à la Serbie et bombardait sa capitale, Belgrade. Par le jeu des alliances entre les pays européens, en quelques jours, l’Europe s’embrasait. À la fin du mois d’août, le Japon déclarait la guerre à l’Allemagne. L’Italie ne s’engagea qu’en 1915 aux côtés de la France et de l’Angleterre, alors qu’auparavant elle faisait partie de la Triple Alliance, qui l’unissait à l’Allemagne et à l’Autriche-Hongrie. Les USA allaient entrer en guerre en 1917. Les colonies et leur population furent elles aussi entraînées dans la guerre. Ainsi, six jours après leur ordre de mobilisation, les armées coloniales britannique et française s’emparaient du Togo, une colonie allemande.
Si une partie des populations furent entraînées par la propagande nationaliste, la violence de la guerre et sa durée eurent tôt fait de les faire changer d’opinion. Une minorité de militants restés internationalistes poursuivirent leur combat à contre-courant. En 1917, la Russie fut le premier pays où les travailleurs se révoltèrent contre la tuerie. Leur mobilisation déboucha, sous la direction du Parti bolchévik, sur la première révolution ouvrière victorieuse, en octobre 1917. Le nouveau pouvoir ouvrier publia les accords secrets qui avaient été conclus entre les puissances alliées, démontrant que leurs buts de guerre étaient bien de s’assurer la domination sur les autres. Les nations opprimées purent apprécier la façon dont les puissances impérialistes concevaient la liberté des peuples dont elles parlaient tant.
L’ordre impérialiste toujours fauteur de guerres
À la fin de cette Première Guerre mondiale, les discours se multiplièrent pour dire que cette guerre était la dernière et que, désormais, grâce à la création de la Société des Nations, ancêtre de l’ONU, les conflits pourraient se régler pacifiquement. Mais pour Lénine, celle-ci n’était qu’une caverne de brigands, dont les rivalités entraîneraient une nouvelle guerre pour un nouveau partage du monde.
Aujourd’hui encore, le maintien de l’ordre impérialiste se traduit par une succession de massacres. Le réarmement général, la montée des tensions entre les grandes puissances, l’aggravation de la crise économique sont autant de signes qu’un nouvel affrontement mondial se prépare. Alors, il est d’autant plus important que, comme ce fut le cas à la fin de la Première Guerre mondiale, renaissent des partis communistes révolutionnaires capables d’amener la classe ouvrière au pouvoir et de transformer cette société.