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- Lutte ouvrière n°2912
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Leur société
Le Pen au grand patronat : à mon tour de vous servir
Le passage de Marine Le Pen à la télévision, jeudi 16 mai, a été l’occasion de déclarations d’amour renouvelées au patronat, à la propriété et à la France éternelle, agrémentées des platitudes d’usage et de quelques perles natives.
Ainsi « les entreprises produisent la richesse », répète la candidate, après bien d’autres de son monde depuis que le capital existe. Il semble bien pourtant que ce soient les travailleurs qui la produisent, alors que les propriétaires se contentent de l’accaparer. Les héritiers des familles Peugeot, Arnault, Lagardère, Dassault, Bettencourt, Mulliez, etc., dont les avoirs s’accroissent par milliards sans qu’ils se soient donné d’autre peine que celle de naître, en sont l’illustration. Ils peuvent d’ailleurs dormir tranquilles, Le Pen considère que les profits, y compris ceux qu’elle qualifie de superprofits, ne doivent pas être taxés.
Pour redresser les comptes publics, Le Pen propose deux grands classiques de la droite depuis au moins un siècle : se débarrasser des fonctionnaires inutiles qui gréveraient le budget de l’État, combattre l’immigration qui ruinerait le pays. Mais depuis des générations, sans avoir eu jusque-là besoin du RN, l’État fonctionne dans bien des domaines à effectifs réduits. Le résultat se paye en classes surchargées, maternités fermées, urgences saturées, canaux et routes non entretenus, quartiers à l’abandon. Le Pen a le front de prétendre remédier à cette situation, alors que poursuivre la réduction du nombre de fonctionnaires ne pourrait que l’aggraver. Quant aux immigrés, loin de ruiner le pays, ils le font fonctionner pour une bonne part en occupant les postes les plus durs et les plus mal payés, dans la production et les services.
L’ex et future candidate à l’Élysée a assorti son propos des habituelles promesses de barrières douanières censées protéger les producteurs nationaux, patrons et ouvriers confondus. Sans dire évidemment que de telles barrières ne peuvent que rançonner les travailleurs en poussant les prix à la hausse, sans les protéger en quoi que ce soit contre les attaques patronales ou gouvernementales.
Quand Le Pen dit que l’État ne doit pas « mettre de bâtons dans les roues des entreprises », elle ne parle pas des grandes, qui savent bien que l’État est à leur chevet. Elle veut plaire aux petits patrons et à ceux des manifestants paysans qui voudraient moins de contrôle, moins d’impôts, mais plus d’aides publiques.
À quelques phrases démagogiques près, Le Pen a strictement le même programme économique que ses principaux concurrents : un gouvernement doit être là pour aider le grand capital à prospérer, et prétendre que cela finira par améliorer le sort du reste de la population. Le mensonge est d’autant plus grossier et prépare des désillusions d’autant plus cruelles que la société s’enfonce dans la crise.