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Dans le monde
Europe : des barbelés toujours plus hauts
Quinze pays européens réclament un nouveau tour de vis contre les migrants, alors que le Parlement européen vient à peine d’adopter un texte baptisé « pacte migration et asile » destiné à favoriser leur expulsion.
Dans une lettre adressée à la Commission européenne, l’Autriche, le Danemark, la Finlande, l’Italie, la Grèce, la Pologne, les Pays-bas, la Lituanie, la Lettonie, l’Estonie, la Bulgarie, la République tchèque, Chypre et Malte réclament « de nouveaux moyens et de nouvelles solutions pour prévenir l’immigration irrégulière en Europe ». Si la France, l’Allemagne, la Suède et la Slovaquie n’ont finalement pas signé la lettre, c’est sans vraiment s’y opposer.
Parmi les prétendues solutions préconisées figure en premier lieu l’expulsion des migrants clandestins vers un pays payé pour cela, à l’image de l’accord conclu entre le Royaume-Uni et le Rwanda ou entre l’Italie et l’Albanie. Les migrants pourraient faire depuis ces pays une demande d’asile en Europe, qui aurait toutes les chances d’être refusée. Les pays européens se verraient alors débarrassés de l’insoluble problème du renvoi des migrants vers des pays d’origine qui refusent de les reprendre pour ne pas susciter la colère de leur population, et pourraient se laver les mains de ce qu’il adviendrait de ces femmes et de ces hommes.
Il s’agirait aussi de généraliser les partenariats signés avec les pays situés sur les routes migratoires pour intercepter les migrants, comme le prévoient déjà les accords conclus avec la Tunisie, la Mauritanie, l’Égypte ou le Liban. L’exemple de la Tunisie, dont le président Kaïs Saïed se déchaîne contre ceux qu’il qualifie de « hordes de migrants clandestins » et lance sa police contre leurs campements avant de les abandonner dans le désert, montre ce que l’Union européenne entend par « des pays sûrs » avec lesquels elle peut conclure des accords.
Les dirigeants des pays européens se servent des migrants comme boucs émissaires pour détourner le mécontentement de leur population. Ils estiment la situation « insoutenable » parce que, en 2023, 380 000 migrants seraient entrés « illégalement » dans une Europe qui compte 450 millions d’habitants. Mais ce qui est insoutenable est le fait que partout dans le monde des femmes, des hommes et des enfants doivent fuir devant les guerres, les famines et la misère. C’est le fait qu’au Sud-Soudan, en République démocratique du Congo, en Éthiopie ou sur les bords du lac Tchad ils s’entassent dans d’immenses campements, où ils sont bien plus nombreux que leurs frères qui errent dans les villes européennes. C’est contre cette calamité, qui a nom le capitalisme, que les travailleurs de tous les pays doivent s’unir, par-delà les frontières et les couleurs de peau.