Chambres d’agriculture : la colère, contre quelle cible ?12/02/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/02/une_2950-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Chambres d’agriculture

la colère, contre quelle cible ?

Fin janvier, les élections des chambres d’agriculture se sont soldées par un recul notable de la FNSEA, essentiellement au profit de la Coordination rurale.

Alors que, lors des élections de 2019, les listes FNSEA/Jeunes agriculteurs avaient décroché la quasi-totalité des chambres départementales, elles en ont cette fois perdu 14 au profit de la Coordination rurale, qui n’en avait que trois auparavant. La liste indépendante des « Ultras de l’A64 », dont les membres s’étaient illustrés dernièrement en bloquant l’autoroute A64, s’est imposée en Haute-Garonne. La Confédération paysanne, marquée à gauche, conserve, elle, ses 20 % de voix, et a remporté le scrutin en Ardèche.

Parmi les 2,2 millions d’électeurs qui étaient appelés à ces élections, il y avait 400 000 chefs d’exploitation, et autant de salariés agricoles. Mais c’est le premier collège, celui des chefs d’exploitation, qui compte, car les règles du scrutin permettent à la liste gagnante dans ce collège d’avoir la direction de la chambre d’agriculture départementale. C’est ainsi que, en 2019, les listes FNSEA/JA avaient remporté la direction de 86 chambres départementales sur 88 alors qu’elles n’avaient recueilli que 55 % des voix des chefs d’exploitation.

Depuis un demi-siècle, la FNSEA cogère les chambres d’agriculture avec l’État, en bonne entente avec les entreprises du secteur agroalimentaire. Cela signifie qu’elle a eu largement la main sur leur budget, qui est annuellement de 800 millions d’euros pour l’ensemble, dont 100 millions réservés à « la représentation des intérêts agricoles auprès des pouvoirs publics ».

La direction des chambres d’agriculture, c’est aussi l’accès à de nombreuses autres instances, comme la Safer, chargée de réguler la vente des terrains agricoles. Par exemple, Thierry Coué, dirigeant de la FNSEA en Bretagne et producteur de porcs, a cumulé jusqu’à 18 mandats (selon l’enquête du média indépendant Splann), dont un à l’Anses – l’agence de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail –, un au Comité régional nitrate, ou encore au Conseil national de la transition écologique.

C’est cette cogestion que nombre d’agriculteurs reprochent à la FNSEA. Cela s’est exprimé au cours des dernières mobilisations.

Les nouveaux élus de la Coordination rurale à la tête des chambres d’agriculture, quels que soient leurs discours électoraux, vont participer à ce système de cogestion, et peut-être décevoir à leur tour. Mais les actions musclées organisées par les membres de cette Coordination contre les marchandises importées et contre des élus écologistes, comme les menaces proférées contre les fonctionnaires chargés de contrôler les exploitations agricoles, veulent faire écho à la radicalisation des agriculteurs qui se reconnaissent dans ces actions violentes. Le positionnement à l’extrême droite de cette Coordination pourrait en faire un vivier pour des militants voulant ainsi ajouter le geste violent à la parole.

Dans une période où la crise s’accentue et les faillites de petites entreprises se multiplient, c’est un courant de petits-bourgeois en colère qui pourrait se développer. Les vrais responsables de la ruine qui menace les petits agriculteurs sont la loi du marché capitaliste, ses banques et ses trusts. En voulant les épargner, un tel mouvement « radical » pourrait au contraire devenir une menace pour la classe ouvrière.

Le vote des salariés agricoles

Les salariés agricoles étaient aussi appelés aux urnes, mais pour choisir seulement six élus sur un total de 34 à 37 par chambre d’agriculture.

Cette sous-représentation des salariés explique peut-être la faible participation, inférieure à 10 % dans la majorité des départements. Les élus ont été en grande majorité des représentants CFDT, suivis de la CFTC, de la CGT et de l’UNSA.

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