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Editorial
Comme les travailleurs britanniques, refusons les sacrifices !
Mercredi dernier, en Conseil des ministres, Macron a donné le ton de la rentrée : il n’y aurait plus le choix, il faudrait se préparer à des sacrifices.
Après avoir énuméré les périls qui nous guettent, la continuation de la guerre en Ukraine, les dérèglements climatiques, la flambée des prix et les risques de pénurie en particulier de l’énergie, le président de la République a expliqué qu’il en était fini de « l’abondance et de l’insouciance ».
Pour tous ceux qui s’usent la santé au travail et ont du mal à joindre les deux bouts, ces mots ne peuvent sonner que comme une provocation et une déclaration de guerre. Les conditions de travail se dégradent depuis des années, la précarité de l’emploi s’est généralisée, et Macron nous parle d’insouciance !
Quel est le salarié qui a connu l’abondance ? Les salaires bloqués, le Smic à 1 300 euros, les suppressions d’emploi, les dix millions de pauvres, les galères de logement et de transport, la misère de l’hôpital public, les difficultés pour obtenir un crédit : c’est ça l’abondance ?
Oh, c’est sûr, il y en a de l’abondance ! Mais elle est réservée aux plus riches, à ces quelques dynasties bourgeoises qui accumulent des montagnes de capitaux, plus de 100 milliards pour le seul Bernard Arnault, le PDG du groupe LVMH. Cela leur permet de se payer des jets privés, des yachts, des palaces, des clubs de foot mais aussi et surtout des sociétés financières, des firmes industrielles et commerciales, des chaînes de télé et des groupes de presse, sources de plus d’enrichissement et de pouvoir.
Oui, une minorité nage dans l’abondance parce qu’elle capte, au travers de l’exploitation, le fruit du labeur de millions de travailleurs à l’échelle du monde. Et cela continuera tant que les exploités ne se révolteront pas pour contester sa domination.
La grande bourgeoisie trouve toujours les moyens de s’engraisser. Elle profite même des crises et elle les alimente. D’abord, en imposant plus d’efforts aux travailleurs. Ensuite, en profitant de sa position dominante pour spéculer et piller les caisses publiques. Elle a très bien profité du Covid, elle profite de la guerre en Ukraine et profitera de l’aggravation de la crise.
Macron est là pour l’y aider. En appelant aux sacrifices, il voudrait que nous nous résignions à l’envolée des prix et aux salaires qui ne suivent pas. Il voudrait que nous acceptions n’importe quel travail, les plus durs et les plus mal payés. Il voudrait que nous nous résignions à nous chauffer moins, nous déplacer moins, nous soigner moins et manger encore moins bien.
Si nous ne retrouvons pas le chemin des luttes, nous reculerons des années en arrière. L’heure n’est pas à se lamenter mais à retrouver la solidarité ouvrière, à se regrouper, s’organiser et se battre pour des objectifs susceptibles de stopper les attaques contre le monde du travail : l’indexation des salaires sur la hausse réelle des prix et le contrôle des agissements des capitalistes.
En choisissant de se battre, les travailleurs britanniques nous montrent la voie. Depuis des semaines, ils se mobilisent dans les chemins de fer, la poste, le métro, certains ports, des entrepôts Amazon. Alors que Thatcher a laissé au patronat un arsenal législatif pour empêcher les grèves, alors que leur gouvernement est aussi antiouvrier que le nôtre, ils se sont lancés et ont été des centaines de milliers à faire grève.
Dans une Grande-Bretagne qui n’avait plus connu de mouvements d’ampleur depuis des décennies, ces grèves montrent un renouveau de la combativité qui doit nous conforter. Car ici aussi, il est temps de rendre les coups.
Il ne s’agit pas seulement de se battre pour une taxation des super profits et une meilleure répartition des richesses. Le gouvernement lui-même est prêt à demander une contribution exceptionnelle à TotalEnergies, grand gagnant de l’envolée du cours du pétrole et du gaz. Mais ce sera pour mieux nous imposer de nous serrer la ceinture et cela n'empêchera pas la crise de s’approfondir.
Vu l’ampleur et la gravité des crises qui nous menacent, il faut se battre pour sauver notre peau de travailleurs et l’avenir de toute la société.
Les capitalistes, leur ordre social et leurs politiciens nous ont plongés dans la catastrophe, le chaos économique et la guerre. Tant qu’ils dominent, il est impossible de nous en sortir.
L’urgence est de s’opposer à leur politique en refusant de se sacrifier pour un système aussi fou et de se préparer à contester leur pouvoir. C’est le seul moyen de les empêcher de nuire et d’offrir un avenir viable à la société.
Nathalie Arthaud