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Procès verbal de carence

De la commission d'enquête de l'ONU sur les circonstances de la mort de Patrice Lumumba à la commission parlementaire d'enquête sur les brutalités policières du 17 octobre, en passant par la lumière promise par Krouchtchev sur les auteurs de l'assassinat de Kirov, les dirigeants du monde paraissent bien troublés par leurs propres crimes. On pourrait parler de conscience et de remords, si ce n'était parler pour ne rien dire.

En effet pour ne citer qu'elle, la commission parlementaire ne pourra enquêter que sur les faits qui ne feront pas l'objet d'une plainte en justice, on devine donc qu'elle ne pourra guère enquêter. Mais il est cependant indiscutable que l'ampleur même des brutalités commises, l'assassinat collectif organisé et pour une fois public, ont choqué l'opinion à un point tel, que la police elle-même s'est émue, se divise et qu'une partie d'entre elle demande le châtiment des coupables et se proposerait de passer à l'action directe si on le lui refuse. Plus extraordinaire encore les partis ouvriers, les syndicats, parlent de faire, eux, quelque chose.

Il faut dire que le trouble est à la mesure du crime. Et on ne peut guère reprocher à la population de ne s'émouvoir que lorsque le crime apparaît au grand jour, on ne peut que le reprocher à ceux qui attendent que la population s'émeuve pour bouger, le plus souvent un cil.

Pendant que CGT, CFTC, PCF et autres, polémiquent sur la façon d'organiser une manifestation commune, s'attaquent mutuellement pour le choix d'une date ou d'un lieu, le temps passe et rien ne se fait. Si : dix mille Algériens se laissent mourir de faim dans les geôles françaises, pour essayer encore, eux-mêmes, de faire quelque chose. Or, un certain nombre d'organisations d'étudiants et d'organisations de jeunes ont appelé à manifester le 18 novembre. Le choix de l'heure, du lieu, des mots d'ordre en est peut-être mauvais. Mais est-ce que cela peut justifier l'abstention des grandes organisations de la gauche ?

Quand on sait de plus que parmi les organisations qui ont appelé à une manifestation il y a l'Union des Jeunesses Communistes de la Seine et de la Seine-et-Oise et les Etudiants du PSU, comment peut-on admettre que le PCF et le PSU laissent leurs jeunes aller à une manifestation sans les soutenir par un appel de leur part à toute la gauche, à toute la classe ouvrière. Si les grandes Centrales syndicales et les partis dits ouvriers faisaient quelque chose, les jeunes n'éprouveraient pas le besoin d'agir indépendamment.

Ce qui est grave c'est que, demain, cette jeunesse déçue ne sera plus mobilisable par la gauche. Pire, elle le sera peut-être par d'autres.

Non seulement les partis « ouvriers » n'apportent aux travailleurs algériens qu'une aide hypocrite, mais ils préparent leur propre défaite, notre défaite à tous.

A moins que, dans ces épreuves, la jeunesse révolutionnaire apprenne, retourne aux sources du marxisme vivant, se retrouve un drapeau, se trempe et forge une direction révolutionnaire capable de prendre la relève des grands et petits fossiles qui abusent d'eux et des travailleurs, depuis déjà plusieurs décades. C'est possible, mais cela reste à faire !

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