Sans surprise, cette boussole indique le cap des profits, et tout ce qui est soupçonné de les limiter doit être jeté par-dessus bord. Le Pacte Vert, qui devait orienter les budgets européens vers les investissements écologiques et durables, perd ses couleurs : une directive réduira les obligations des entreprises en matière de lutte contre le dérèglement climatique ainsi que leurs responsabilités vis- à-vis des pratiques sociales et environnementales de leurs sous- traitants. La vie administrative des patrons sera facilitée : les entreprises comptant entre 250 et 1 500 employés seront considérées comme des PME pour certaines démarches, et une préférence dans les marchés publics de certains secteurs d’activité sera accordée aux entreprises européennes.

Mais il ne suffit pas d’une boussole pour faire avancer un navire. Or, une question épineuse n’est toujours pas réglée : comment l’Union européenne financera-t-elle ce plan ? Le rapport de l’ancien président de la Commission européenne Mario Draghi, publié en septembre, chiffrait les besoins à 800 milliards d’euros pour faire face au protectionnisme américain. Mais plusieurs pays de l’Union ne veulent pas d’un financement commun.

En fait, les capitalistes des différents pays européens sont tout autant concurrents qu’alliés. Incapables de renoncer au soutien de leurs États nationaux, tout en voulant bénéficier d’un vaste marché européen, ils perdent du terrain dans la concurrence mondiale.

On peut être certain que, pour résoudre leurs problèmes de compétitivité, à défaut de résoudre cette contradiction, c’est aux travailleurs qu’ils demanderont de ramer encore plus vite.