Trump ou Harris... et à la fin, c’est le Big Business qui gagne30/10/20242024Journal/medias/journalarticle/images/2024/10/cadr%C3%A9e_bouteille_corrig%C3%A9e_ok_Lupo.png.420x236_q85_box-0%2C23%2C799%2C472_crop_detail.png

Editorial

Trump ou Harris... et à la fin, c’est le Big Business qui gagne

Illustration - Trump ou Harris... et à la fin, c’est le Big Business qui gagne

Les élections aux États-Unis sont sans doute le scrutin le plus suivi au monde, et les deux candidats sont au coude à coude.

Trump est le digne représentant des milliardaires dont il est : arrogant, sans scrupules et surtout déterminé à enrichir la classe capitaliste. Du coup, il prend pour cible les plus pauvres, les migrants qui franchissent la frontière en quête d’une vie meilleure, qu’il traite de « criminels » et de « vermine ». À l’inverse, il promet aux plus riches d’alléger encore les impôts.

Kamala Harris n’est pas en reste. « Je suis capitaliste », explique-t-elle aux milieux patronaux. Sous l’administration de Biden, dont elle est la vice-présidente, l’indice boursier a doublé et les milliardaires se sont enrichis comme jamais. Elon Musk, le patron mégalo de Tesla, X et SpaceX, qui soutient Trump, est bien ingrat : sa fortune, déjà 25 milliards de dollars en 2020, a été multipliée par dix sous Biden ! Pour la grande masse de la population en revanche, le niveau de vie s’est dégradé, avec des prix qui ont enflé de 25 %, sans que les salaires suivent. Et certains, désorientés, se rabattent du coup sur Trump, cet ennemi patenté des travailleurs.

Malgré l’incertitude du scrutin, on sait déjà qui seront les gagnants et les perdants. Dans ce pays présenté comme un eldorado, toute une partie des travailleurs sont obligés de cumuler deux, voire trois emplois précaires et mal payés pour pouvoir joindre les deux bouts. Le pays se vante d’un chômage bas, mais c’est parce que des millions de travailleurs, sortis du marché du travail, échappent désormais aux statistiques. Au cœur de la première puissance mondiale, le nombre de sans-abri explose, il y en aurait plus de 75 000 rien qu’à Los Angeles, où ils ne vivent guère au-delà de 50 ans. L’espérance de vie de toute la population recule, plaçant sur ce plan le pays au 35e rang mondial, derrière Cuba ou le Chili. Chaque année, plus de 100 000 Américains, issus pour la plupart des classes populaires, meurent d’overdose. Quelque 45 000 autres meurent faute de pouvoir se payer des soins médicaux. Et cela ne changera pas après le 5 novembre.

À l’autre bout de la société, il est certain que, quel que soit le nouveau président, les Jeff Bezos et autres Mark Zuckerberg continueront de toucher le gros lot. Quant à la politique étrangère du pays, elle sera poursuivie. Harris et Trump ont par exemple annoncé qu’ils continueraient de fournir les armes et l’argent avec lesquels Israël mène la guerre aux Palestiniens, aux Libanais et peut-être demain aux Iraniens.

Vu d’ici, la grossièreté et le cynisme décomplexé de Trump sont étonnants. Pourtant, le système américain n’est pas si différent du nôtre. Tous les quatre ou huit ans, c’est l’alternance entre deux partis pro-capitalistes ? Comme ici. Trump est mégalomane ? Assurément, mais Macron ne l’est-il pas ? Trump a fait du racisme un fonds de commerce, et dans ce pays construit par des immigrants, lui et Harris promettent, de façon absurde, de restreindre l’immigration. Les politiciens français, Le Pen en tête, ne disent pas autre chose. Il faut construire un mur et expulser les sans-papiers, disent là-bas Trump et Harris ; il faut renforcer les frontières et expulser les sans-papiers, expliquent ici Barnier, Macron et Le Pen.

Rien n’est donc à espérer de ce scrutin, mais nous aurions tort de nous désintéresser de l’avenir de ce pays. Pas seulement parce qu’il est à la pointe de l’innovation scientifique et technologique. Mais aussi parce qu’il est fort d’une classe ouvrière qui, par le passé, a mené des luttes importantes. Des grandes grèves ouvrières à la révolte des Noirs et à la lutte de la jeunesse contre la guerre du Vietnam, celles et ceux qui créent la richesse du pays se sont battus. Aujourd’hui, leur condition se dégrade sous les coups d’une classe capitaliste rapace. Mais quelques grèves récentes, malgré des directions syndicales réformistes qui ne valent pas mieux que les nôtres, ont montré que les travailleurs des États-Unis pouvaient se battre pour leurs revendications.

C’est de là qu’un espoir peut venir. Les révoltes des années 1960 eurent une portée mondiale. De même, un renouveau des luttes aux États-Unis aujourd’hui aurait un impact dans le monde entier. Alors, espérons qu’au-delà de l’échéance du 5 novembre, les travailleurs américains ne se laissent pas appauvrir et diviser, et qu’ils retrouvent le chemin de la lutte de classe.

Bulletins d’entreprise du 29 octobre 2024

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