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Leur société
Taxe Zucman “light” : le PS ménage la stabilité… et les riches
Soucieux de préserver la stabilité gouvernementale sans donner l’impression de s’aligner totalement sur Lecornu, le PS a proposé d’inclure dans le budget 2026 une version allégée de la taxe Zucman. Ce serait, pour lui, une contrepartie acceptable pour sa non-censure du gouvernement.

Dans la version originelle, l’économiste Gabriel Zucman préconisait que, à partir d’un patrimoine de 100 millions d’euros, les grandes fortunes paient chaque année un impôt total équivalant à 2 % de leur richesse, biens professionnels inclus. Selon lui, cette taxe aurait concerné environ 1 800 foyers fiscaux et rapporté quelque 20 milliards d’euros à l’État. Cela n’aurait pas écorné la fortune des familles de la grande bourgeoisie, dont les 500 plus riches cumulent en 2025 un patrimoine de 1 130 milliards d’euros. Mais les grands capitalistes français avaient poussé des hauts cris, Bernard Arnault accusant Zucman d’être un militant d’extrême gauche voulant « mettre à terre l’économie française ».
Dans la version « light », le seuil de fortune imposable serait abaissé à 10 millions d’euros et le taux augmenté à 3 % mais les entreprises dites innovantes et les entreprises familiales seraient exonérées. Le rendement fiscal ne serait plus que de 5 à 7 milliards d’euros, ce qui n’empêche pas le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, Boris Vallaud, de parler d’une « mise à contribution sérieuse des très hauts revenus, des hauts patrimoines, des multinationales » !
Comme l’a déclaré Zucman lui-même, instaurer des possibilités d’exonération revient à ouvrir la boîte de Pandore : « Les personnes fortunées sont bien conseillées et elles risquent d’exploiter ces échappatoires pour échapper à l’impôt. » Il a également rappelé que le taux effectif d’imposition des milliardaires français était d’environ 0,005 % lors de l’abolition par Macron de l’Impôt sur la fortune (ISF), conçu par la gauche de telle sorte que les plus riches trouvaient sans difficulté le moyen de ne pas le payer.
Le PS n’a pas plus pour objectif aujourd’hui qu’hier de faire payer les riches. Il veut seulement se distinguer un peu des macronistes et de la droite, tout en restant responsable vis-à-vis de la bourgeoisie, c’est-à-dire en participant à l’élaboration et au vote du budget et en permettant au gouvernement Lecornu de durer. Pour l’heure, celui-ci ne lui renvoie pas l’ascenseur pour son soutien : il s’est prononcé contre la taxe, même dans sa version allégée. Il a certes, en revanche, mis en avant le maintien de la surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises mais, en réalité, il l’a réduite. Mise en place en 2025, cette surtaxe censée être exceptionnelle avait permis à l’État d’encaisser 8 milliards d’euros. Le budget 2026 initial devait la reconduire à hauteur de 4 milliards ; dans une version amendée, adoptée par l’Assemblée nationale le 27 octobre, elle devrait finalement rapporter 6 milliards. Il s’agit donc bien d’une baisse par rapport à 2025. En outre, le gouvernement a fait adopter une nouvelle baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), soit 1,3 milliard d’euros d’impôts sur les entreprises en moins.
D’ici l’adoption définitive du budget, les rebondissements et tractations ne manqueront pas. D’autres faux- semblants fiscaux seront probablement encore vantés comme des gestes de justice, toujours sans toucher aux fortunes capitalistes. Les vrais efforts ne manqueront pas mais ils seront encore et toujours demandés aux classes populaires.