Un Premier ministre de droite, sous contrôle de l’extrême droite11/09/20242024Journal/medias/journalarticle/images/2024/09/P2_Carriere_Barnier_ok_Lupo.jpg.420x236_q85_box-0%2C771%2C2000%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Un Premier ministre de droite, sous contrôle de l’extrême droite

Illustration - Un Premier ministre de droite, sous contrôle de l’extrême droite

Après deux mois de tractations qui ont tourné à la farce politicienne, nous voilà avec un Premier ministre de droite qui ravit le patronat, et une Marine Le Pen en position de force ! En effet, Macron a nommé le LR Michel Barnier avec l’assurance que le RN ne le renverserait pas immédiatement. L’intérimaire de Matignon est, de fait, à la merci de Le Pen. Il faut donc s’attendre à une politique dure vis-à-vis des travailleurs, et particulièrement vis-à-vis de la fraction immigrée de la classe ouvrière.

Et Michel Barnier n’aura pas à se forcer ! À son CV, il a cinquante années de bons et loyaux services rendus à la bourgeoisie, dans les institutions françaises ou européennes. Candidat à la primaire de la droite pour la présidentielle de 2022, il prônait la retraite à 65 ans, la suspension des indemnités chômage après deux refus d’offres « raisonnables », un moratoire sur l’immigration…

Barnier s’attaquera donc aux travailleurs avec le soutien de Le Pen et de Bardella. Ceux-ci en profitent, au passage, pour se montrer responsables, répétant à l’envi qu’ils ne sont pas pour le blocage et l’instabilité. Le RN roue de secours du système bourgeois, voilà son vrai visage !

De leur côté, les dirigeants du Nouveau Front populaire, premier groupe à l’Assemblée mais loin d’avoir la majorité, ont été écartés du pouvoir par Macron. Ils crient au déni démocratique et certains accusent même Macron d’avoir trahi le Front républicain en s’en remettant à Le Pen.

Mais la véritable duperie est dans ce Front républicain. C’était de se désister et d’appeler les électeurs de gauche à voter pour la macronie, pour la droite, et même pour un Darmanin ou une Borne. C’était de faire croire que tous ces gens-là seraient un barrage à la montée de l’extrême droite et qu’ils étaient, d’une façon ou d’une autre, du bon côté de la barricade.

Cette duperie-là est de la responsabilité de la gauche. C’est elle qui a propagé cette illusion, uniquement pour obtenir quelques élus de plus, car elle savait que Macron servait la soupe au RN ! Elle savait qu’il avait fait un copié-collé de la politique du RN avec la loi immigration !

De la gauche à l’extrême droite, on trouve les mêmes politiciens : des opportunistes prêts à retourner leur veste et à s’allier à ceux qu’ils désignaient, la veille encore, comme leurs pires adversaires.

Tous ces politiciens ont en commun de se placer dans le cadre de l’organisation capitaliste de la société, c’est-à-dire sous la domination des grandes familles bourgeoises qui contrôlent l’essentiel de l’économie au travers de leurs trusts industriels et financiers. Et tous se veulent des « gestionnaires loyaux », ce qui revient toujours à se mettre au service des Arnault, Bolloré, Peugeot, Mulliez, Dassault...

C’est pourquoi, malgré leur variété, il n’y a jamais eu un seul gouvernement qui ait interdit au grand patronat de fermer une usine et de licencier ou qui l’ait forcé à augmenter les salaires. Et c’est dans l’ordre des choses : on ne peut pas être dans le camp patronal ET dans celui des travailleurs. Dans le camp des exploiteurs ET celui des exploités, dans le camp des licencieurs ET celui des licenciés.

Pour défendre leurs intérêts, les travailleurs ont à construire un parti qui soit prêt à s’affronter à la classe capitaliste, sa rapacité et sa loi du profit. Ce ne sera pas un énième parti de politiciens, jouant les pantins du grand capital à l’Élysée ou à Matignon, mais un parti de travailleuses et de travailleurs conscients que le grand patronat tient nos vies entre ses mains, et que nous ne le ferons reculer qu’au travers de nos luttes et du rapport de forces que nous imposerons.

Ce parti doit être fondé sur la conviction que la grande bourgeoisie est une classe parasitaire, irresponsable. Qu’il faut la renverser car elle mène les travailleurs et la société à la ruine et à la guerre, comme c’est déjà le cas dans bien des régions du monde. Il ne s’agit pas seulement d’arracher quelques miettes à la bourgeoisie, de la forcer à nous rendre deux ans de retraite ou de lui faire payer un peu plus d’impôts, il faut l’empêcher de nuire, en lui enlevant le pouvoir.

L’idée que les travailleurs peuvent peser par en bas, s’organiser, entrer en lutte et postuler à la direction de la société, en lieu et place des rapaces que sont les bourgeois, et des arrivistes que sont les politiciens, est très minoritaire car, aujourd’hui, les travailleurs ne s’en sentent pas capables.

Mais s’il y a une chose, une seule chose, que doit faire un parti dans le camp des travailleurs, c’est de populariser cette idée, car il n’y a pas d’autre voie pour sortir l’humanité de la barbarie dans laquelle elle est en train de plonger.

Nathalie Arthaud

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