Nestlé : profits en eaux troubles05/02/20252025Journal/medias/journalarticle/images/2025/02/Nestl%C3%A9_wtaers.png.420x236_q85_box-0%2C5%2C280%2C163_crop_detail.jpg

Leur société

Nestlé : profits en eaux troubles

Les résultats financiers de Nestlé ne sont pas encore publiés pour l’année 2024. Mais en attendant, l’accumulation de scandales récemment dévoilés a mis la multinationale à la une.

Illustration - profits en eaux troubles

Après celui des pizzas Buitoni, celui des fraudes multiples sur les eaux minérales, fin janvier, l’association AC anticorruption a annoncé que Nestlé serait jugé en mai pour abandon illégal de déchets et entretien d’une décharge sauvage dans les Vosges. L’entreprise est accusée d’avoir abandonné illégalement plus de 360 000 mètres cubes de bouteilles d’eau en verre et en plastique à Contrexéville et à Saint- Ouen-lès-Parey entre 2021 et 2024. Il lui est aussi reproché d’avoir abandonné des tonnes de carcasses de véhicules, gravats et plastiques qui ont contaminé les eaux environnantes. Malgré la « dégradation substantielle de l’environnement » invoquée par le tribunal dans son avis d’audience, il aura fallu attendre trois ans avant que Nestlé soit poursuivi.

À peine quelques jours plus tard, le 4 février, des journalistes du Monde et de Radio France ont rappelé, à la suite de ceux de Mediapart, que Nestlé continuait sciemment à commercialiser ses eaux minérales dites naturelles bien qu’elles soient traitées par des procédés de désinfection et de filtration proscrits par les autorités sanitaires et de la répression des fraudes. Le mea culpa soigneusement orchestré par ses dirigeants il y a quelques mois a permis à Nestlé d’éviter un procès au prix d’une amende de 2 millions d’euros, et de poursuivre ses livraisons d’eau, y compris pour certaines d’entre elles sans la précision « eau minérale naturelle » et sous une marque quelque peu différente.

Mais surtout, l’investigation des journalistes a montré l’existence de relations datant de 2021 entre les plus hauts sommets de l’État et des lobbyistes travaillant pour Nestlé, afin que la firme puisse poursuivre son très rentable commerce d’eau en bouteilles, en passant outre la réglementation. Des notes de conclusion inquiétantes et des alertes venant des autorités de santé ont été laissées en sommeil et ignorées au sommet des ministères, moyennant quoi la tromperie sur la qualité de l’eau vendue s’est perpétuée au vu et au su des ministres et de Macron.

La pression du lobby a même été qualifiée de « chantage » par la direction générale de la Santé en janvier 2023 quand les autorités dites compétentes ont permis à Nestlé de contourner la réglementation, en faisant évoluer les normes malgré le réel risque sanitaire. À l’époque, Nestlé avait menacé de durcir son plan de suppressions d’emplois dans les Vosges si le procédé de microfiltration de l’eau pompée au moyen de filtres d’un diamètre de 0,2 micron (inférieur à la norme officielle de 0,8 micron) n’était pas autorisé. Cette filtration à 0,2 micron introduit une « fausse sécurisation » et peut « exposer les consommateurs à un risque sanitaire en lien avec l’ingestion de virus », écrivait l’Anses en 2022.

Interrogés par les journalistes lors de cette enquête, ni Macron, ni les directeurs de cabinet de Borne, de Le Maire, de Pannier-Runacher, de Braun, encore moins les ministres, ne se souviennent de quelque alerte que ce soit. Quant au géant capitaliste Nestlé, avec ses 12 milliards d’euros de bénéfices en 2023, malgré un chiffre d’affaires en repli, il montre qui tire les ficelles dans cette société.

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