Mayotte : le mépris de l’État05/11/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/11/une_2988-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Leur société

Mayotte : le mépris de l’État

Près d’un an après le cyclone Chido qui a dévasté Mayotte, la situation est toujours catastrophique. L’état de l’éducation en est une illustration frappante. Si les plus riches peuvent mettre leurs enfants dans des établissements privés bien dotés, ceux des classes populaires sont largement privés d’école.

Nombre d’élèves continuent de n’avoir cours que deux heures et demie par jour, par manque de bâtiments. Les écoles détruites ne sont pas reconstruites et, pour celles qui ont été endommagées, les travaux progressent lentement. Ce mépris évident de l’État suscite la colère des habitants. Ainsi, depuis plusieurs semaines, des parents d’élèves d’une école de Kawéni bloquent l’établissement pour dénoncer les conditions déplorables dans lesquelles leurs enfants sont forcés d’étudier : pas de ventilateurs, des salles régulièrement inondées car les fenêtres à clayettes sont cassées, et des sanitaires hors d’usage. Le peu qui fonctionne le doit à l’initiative des travailleurs de l’éducation, comme ces instituteurs qui achètent eux-mêmes les craies, les cahiers et autres manuels pour leurs élèves !

Quant à leurs collègues du secondaire, plusieurs centaines d’entre eux, contractuels, n’ont pas été payés par le rectorat, certains depuis le mois d’août. Ils se sont mobilisés à plusieurs reprises, soutenus par les parents d’élèves, pour dénoncer cette situation révoltante. Une enseignante, seule avec sa fille, venant d’arriver sur l’île, s’est retrouvée à la rue car dans l’impossibilité de payer un loyer. La solution du rectorat, son employeur, a été : « Appelez le 115 et demandez un hébergement d’urgence » ! À ceux qui demandaient un acompte, il a répondu de se tourner vers leur banque pour qu’elle leur fasse une avance.

En réponse, les enseignants des collèges de Koungou et Mtsamboro étaient en grève lundi 3 novembre, bien décidés à ne plus accepter les fausses promesses d’une direction qui se moque de leur situation. Ces défaillances découlent des coupes dans les effectifs et des recrutements de personnel faits par le rectorat, dans l’urgence et sans formation. Cette course aux économies du gouvernement risque encore de s’aggraver avec les coupes drastiques prévues dans le budget 2026 en discussion au Parlement. Au passage, les quatre milliards d’euros sur cinq ans promis il y a quelques mois pour la reconstruction de Mayotte semblent destinés à passer à la trappe.

Des moyens, il en faudrait pourtant pour reconstruire les établissements, embaucher suffisamment d’enseignants, de surveillants et d’agents d’entretien... et pour accueillir l’ensemble des enfants de l’île. Car, aujourd’hui, des milliers d’enfants sans papiers ne sont pas scolarisés. L’État, qui préfère mettre ses milliards à acheter des Rafale et des obus, n’offre aux jeunes de Mayotte qu’une éducation au rabais voire pas d’éducation du tout. Cela ne l’empêchera peut-être pas demain de venir les recruter pour avoir son quota de chair à canon… à moins que la jeunesse de l’île n’en décide autrement car les raisons de se révolter s’accumulent.

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