Mayotte : une aide insuffisante et qui est détournée26/02/20252025Journal/medias/journalnumero/images/2025/02/une_2952-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Leur société

Mayotte : une aide insuffisante et qui est détournée

Plus de deux mois après le passage dévastateur du cyclone Chido, le torchon brûle entre les élus locaux mahorais et l’État. Alors qu’ils se renvoient la balle à propos du détournement de l’aide alimentaire, la situation est toujours dramatique pour une grande majorité de la population.

Un article du journal Le Monde daté du 14 février a révélé ce que beaucoup dénonçaient depuis de nombreuses semaines sur l’île : ils ne voient pas la trace des colis et ils soupçonnent les élus de les détourner à des fins clientélistes. Cela n’est nullement une nouveauté à Mayotte mais la misère accentuée par le passage de Chido rend ces détournements encore plus révoltants.

L’association des maires de Mayotte a fait savoir que ces derniers n’organiseraient plus les distributions. Pour se défendre, ils ont souligné que l’État français n’envoyait pas suffisamment d’aide. Et, en effet, si le préfet se vante que 300 tonnes de nourriture ont été acheminées depuis le 14 décembre, cela représente moins d’un kilo par habitant, depuis plus de deux mois ! Et pour l’eau potable, dont le manque se fait cruellement sentir, les 100 000 litres par jour annoncés, dont une bonne partie part au marché noir, correspondent à deux verres d’eau par habitant. Manuel Valls, ministre des Outre-Mer, joue aux vierges effarouchées en se demandant où est passée l’aide « dans le dernier kilomètre », mais c’est vraiment l’hôpital qui se moque de la charité ! Les élus locaux ne sont là que des profiteurs à la petite semaine, à côté d’un État qui se croit quitte en distribuant des aumônes.

À propos des distributions conditionnées à la présentation d’une pièce d’identité, le même Valls a osé les critiquer, disant que « sur l’urgence vitale et l’aide alimentaire, il ne peut y avoir de discrimination ». Or son gouvernement, par la voix du préfet, a conditionné par exemple l’achat de tôles pour reconstruire les maisons à la présentation d’une pièce d’identité. C’est aussi son gouvernement qui a refusé d’envoyer des secouristes dans les bidonvilles rasés par Chido, abandonnant les survivants. Et c’est l’État français qui discrimine depuis des décennies, organisant rafles et déportations, séparant les familles et rendant la vie impossible à plus de la moitié de la population. Alors, en matière de discrimination, les élus locaux ne peuvent que se sentir encouragés par cette politique révoltante de l’État, faite d’attaques incessantes contre tous ceux qu’il considère comme des étrangers à Mayotte.

Suite au discrédit des élus, l’État a trouvé d’autres relais locaux. Le préfet a annoncé qu’à partir de la fin du mois de février, au début du ramadan, les distributions seraient faites dans les mosquées. Cela ne garantit en rien que l’aide soit équitablement partagée, mais seulement que les imams, promus meilleurs gardiens de l’ordre établi, répartiront les colis insuffisants avec une autorité renforcée et à leur guise.

Face à cette situation révoltante, la population ne peut compter que sur elle-même. Dockers, travailleurs de la logistique, des supermarchés, habitants des quartiers populaires auraient les moyens de s’organiser pour contrôler l’acheminement et la répartition. Pour en finir avec la pénurie, ils pourraient imposer que les stocks alimentaires vendus à prix d’or par les magnats de la grande distribution, Hayot comme Sodifram, soient réquisitionnés et distribués gratuitement. Ce sont des mesures vitales que l’on ne peut attendre ni du préfet ni des maires, ni des imams.

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