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- Lutte ouvrière n°2916
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Dans le monde
Haïti : “Imposons un rapport de force favorable aux masses exploitées”
Devant l’effondrement de l’État en Haïti, les Nations Unies avaient voté en octobre l’envoi d’une Mission multinationale d’appui à la sécurité, c’est-à-dire d’une force militaire. Elle serait sur le point d’arriver. Cet article est l’éditorial du 6 juin du journal La Voix des travailleurs édité par l’OTR (Organisation des Travailleurs révolutionnaires) – Union communiste internationaliste-Haïti, consacré à cette question.
Dans de nombreux quartiers populaires, la population exprime son soutien à l’arrivée des soldats étrangers. Découragée, elle y voit un moyen de faire fléchir les gangs et une circonstance favorable qui faciliterait son entrée en lutte. On est loin de l’opération « bwa kale » contre les gangs l’année dernière, quand les manifestants dénonçaient l’intervention militaire de l’impérialisme américain comme un appui aux classes riches et aux gangs contre lesquels ils se battaient dans les rues à juste titre. L’impérialisme ne fait pas débarquer son matériel militaire en soutien aux revendications de la classe ouvrière, pas plus qu’il ne vient pour reconstruire les maisons détruites dans les quartiers populaires, les hôpitaux publics, etc. Il vient pour rétablir l’ordre capitaliste orthodoxe mis à mal par les gangs armés, en remettant en selle la même vieille classe politique corrompue, la même classe bourgeoise rapace.
S’il doit engager la bataille contre les gangs, l’impérialisme tolérera peut-être de la population le déchouquage de quelques bandits. Mais si ses revendications débordent ce cadre restreint et se dirigent contre les intérêts des classes possédantes et contre le système capitaliste, nul doute que ces mêmes matériaux seront utilisés contre les classes populaires. Telle sera la nouvelle réalité qui se dressera devant tous ceux qui se réclament du camp des travailleurs. La Mission multinationale de soutien à la sécurité sera objectivement, en cas de révolte des masses populaires contre le système capitaliste qui a créé les gangs, un nouveau groupe armé à long terme qui se dressera contre leurs intérêts.
Loin de faire peur, une claire analyse des forces sur le terrain enlèvera toute illusion dans la tête des masses populaires dans la conduite claire de leurs luttes. Le contrôle du pays par les gangs a plongé les classes populaires dans une situation catastrophique. Leur situation n’était déjà pas enviable avant. Contre la classe dominante et contre les gangs, les classes exploitées doivent se battre pour imposer un rapport de force qui pourra leur permettre d’obtenir la satisfaction de leurs revendications.
Les masses esclaves l’avaient fait pour arracher leur liberté en 1794, en imposant un rapport de force avec les métropoles esclavagistes de la France, de l’Espagne, de l’Angleterre. Elles l’ont refait une dizaine d’années plus tard pour arracher l’indépendance du pays des griffes de la France. Elles peuvent le faire en mieux aujourd’hui pour arracher la liberté de la classe ouvrière.