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Dans le monde
Les grévistes de Boeing tiennent bon
La grève de 33 000 travailleurs de Boeing, dans la région de Seattle, au nord-ouest des États-Unis, commencée le 13 septembre, est toujours en cours malgré les efforts de la direction et de l’appareil syndical pour l’arrêter.
La grève a démarré peu après que la direction et le syndicat IAM ont estimé avoir conclu un accord qualifié d’historique, prévoyant d’augmenter les salaires de 25 % sur les quatre prochaines années. Les travailleurs ont alors rejeté presque unanimement ce projet de contrat collectif, et voté la grève, contre l’avis des bureaucrates syndicaux, revendiquant 40 % d’augmentation.
Après plusieurs semaines de grève, au cours desquelles la direction de Boeing a prétendu successivement ne pas pouvoir aller au-delà de 25 % d’augmentation, puis de 30 %, un nouveau projet de contrat collectif a été mis aux voix par le syndicat le 23 octobre, incluant 35 % d’augmentation. Biden, qui se présente comme l’ami des travailleurs, a envoyé sa secrétaire d’État au Travail parrainer ce nouvel accord pour faire cesser la grève.
Les grévistes ont été soumis à de grandes manœuvres dans ce sens. L’indemnité de grève, versée par le syndicat aux grévistes en remplacement de leur salaire qu’ils ne touchent plus, a diminué drastiquement à partir de la troisième semaine de grève et on leur a fait miroiter un bonus de 7 000 dollars en cas de signature de l’accord.
De plus, Boeing a annoncé un plan de 17 000 licenciements, en dehors des secteurs grévistes, « pour l’instant ». Toutes sortes d’économistes, relayés par les médias, répandent des chiffres catastrophistes sur la santé financière de cet avionneur de taille mondiale.
Pourtant, les dirigeants syndicaux se sont montrés beaucoup plus prudents quant aux réactions des syndiqués. Tout en recommandant de voter en faveur du nouvel accord conclu avec la direction, ils ont évité de le présenter comme historique. En effet, les deux tiers des travailleurs l’ont rejeté : leur volonté de continuer à se battre pour 40 % d’augmentation s’est révélée manifeste.
Cette revendication salariale est très loin d’être démesurée : même en y ajoutant différentes primes, elle ne permettrait même pas de rattraper le blocage des salaires en cours depuis des années face à une inflation qui s’est accélérée depuis 2020.
Une autre revendication motive beaucoup de grévistes : retrouver le régime de pensions de retraite que l’avionneur a jeté par-dessus bord il y a dix ans. À l’époque, le syndicat IAM avait cédé sous la menace proférée par la direction de fermer des usines et de déplacer la production dans les régions où les salaires sont plus faibles. C’est resté en travers de la gorge des travailleurs, qui n’ont jamais accepté ce recul.
« Chaque jour de plus, nous sommes plus forts ! » (« One day longer, one day stronger ! ») : c’est le slogan des grévistes, qui estiment que leur longue grève les met en position de force et que c’est le moment de faire plier Boeing sur la question des retraites.
L’enjeu de ce mouvement va bien au- delà de Boeing face à 33 000 de ses salariés. L’ensemble des 170 000 salariés de Boeing, et bien d’autres travailleurs, font face aux mêmes attaques patronales et auraient tout intérêt à rejoindre cette lutte, même si les directions syndicales y opposent leur inertie.
Manifestement, les grévistes de Boeing n’ont pas l’illusion que l’élection présidentielle américaine peut changer quoi que ce soit en leur faveur et sentent que leur force est dans la grève.