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Leur société
“Devoir conjugal” : le droit de propriété… sur les femmes
Jeudi 23 janvier, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a donné raison à une femme en se prononçant contre le jugement prononcé en France concernant son divorce.
En 2019, la cour d’appel de Versailles avait considéré, suite au « refus continu opposé par l’épouse à partir de 2004 d’avoir des relations intimes avec son mari », que cela constituait « une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ».
Voulant contester cette décision, cette femme de 69 ans a épuisé toutes les voies de recours en France, avant de se tourner vers la CEDH en 2021, soutenue par des associations féministes. Elle a dénoncé une atteinte à son droit au respect de la vie privée et une vision archaïque du mariage, dans un contexte de violences conjugales et de problèmes de santé graves.
Malgré les luttes et les progrès des droits des femmes, une partie des juges considère donc toujours que le corps d’une femme est la propriété de son mari. Il a fallu attendre 1990 pour que la Cour de cassation reconnaisse le viol d’une femme par son mari, et 1994 pour que cela entre dans le code pénal. Or, justement, d’après une étude en 2022, 41 % des viols rapportés à la police seraient le fait du conjoint ou de l’ex-conjoint. Mais certains juges ont continué de considérer que, dans le mariage, il y a obligation de relations sexuelles, s’appuyant sur les notions de fidélité et de « communauté de vie » tirées d’articles du code civil de 1804.
Cette jurisprudence est donc remise en cause par l’arrêt de la CEDH du 23 janvier. Encore faudra-t-il que des femmes ou des hommes osent l’invoquer devant les tribunaux, face à un appareil d’État qui, lui, n’a pas forcément changé. On compte déjà plus de 600 condamnations de l’État français par la CEDH depuis sa création, notamment concernant les conditions des détenus, le traitement des immigrés, ou encore les mœurs et la famille… condamnations qui n’ont pas eu beaucoup d’effet.
Le mariage reste vu par une bonne part de la société comme un contrat de propriété de l’homme sur la femme. La propriété c’est le vol… et même parfois le viol.