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Corée du Sud : grève chez le géant Samsung
Plus de 6 500 travailleurs de Samsung Electronics ont entamé la première grève de l’histoire de ce groupe sud-coréen.
Tout comme Hyundai et LG, Samsung est un conglomérat industriel géant et fait partie du club très restreint des trusts dominant l’économie sud-coréenne depuis les années 1960. Ces entreprises gigantesques ont émergé à partir de pratiquement rien dans le cadre de l’industrialisation à marche forcée du pays, grâce à l’interventionnisme étatique de la dictature de l’époque, et avec le soutien actif du gouvernement des États-Unis.
La branche électronique de Samsung (téléphones portables, ordinateurs, appareils électroniques en tous genres, conception et fabrication de semi- conducteurs…) compte 125 000 salariés. Mais elle ne représente qu’une partie des activités du conglomérat qui est aussi présent dans la construction navale, le bâtiment, les assurances ou encore la grande distribution.
La direction de l’entreprise a toujours cherché à empêcher l’apparition de syndicats. Mais, il y a quelques années, des salariés soutenus par la Fédération des syndicats de Corée ont réussi à créer le premier syndicat chez Samsung Electronics. Et depuis six mois, celui-ci s’est considérablement développé, multipliant ses effectifs par trois : de 10 000 syndiqués fin 2023, il est passé à plus de 30 000 aujourd’hui.
Alors que le groupe accumule des profits considérables (plus de 11 milliards d’euros de bénéfices pour le seul premier semestre de 2024), deux annonces ont déclenché un fort mécontentement. La direction de la division semi-conducteurs a déclaré qu’elle ne paierait pas de prime annuelle d’intéressement pour 2023, puis la direction centrale a refusé l’augmentation de salaire de 6,5 % réclamée par le syndicat. À cela, il faut ajouter que, selon le représentant du syndicat de Samsung Electronics, cela fait dix ans que la direction exerce une pression à la baisse sur les salaires et force les employés à accepter toujours plus de sacrifices.
Alors, fin mai, après que la direction eut coupé court aux négociations salariales, le syndicat a préparé la grève. Un rassemblement de plusieurs milliers de personnes a eu lieu le 24 mai devant le siège de l’entreprise à Séoul. Une première tentative de journée de grève a suivi, le 7 juin. Et, finalement, le syndicat a appelé les travailleurs à une « grève générale » du 8 au 10 juillet. Le lundi 8, un rassemblement s’est tenu devant l’entrée principale de l’usine Samsung Electronics de Hwaseong, une ville située au sud de Séoul. Plus de 4 000 grévistes venus de tout le pays ont manifesté vêtus de noir de façon très organisée, presque en formation militaire comme c’est souvent le cas lors des grèves en Corée du Sud. Et dans la foulée de ce succès, le syndicat a appelé à la continuation de la grève.
Quelles que soient les suites immédiates de cette grève, pour les travailleurs de Samsung Electronics et pour leur syndicat, elle est déjà une réussite. Elle a montré qu’ils pouvaient s’organiser à l’échelle de l’ensemble des sites de Corée du Sud et que les fortes pressions d’une direction réputée pour sa haine des organisations ouvrières n’avaient pas réussi à empêcher ce mouvement. Et les images des rassemblements massifs ont dû marquer bien des travailleurs dans le groupe Samsung et au-delà.