Colombie : les crimes de Chiquita19/06/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/06/une_2916-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Colombie : les crimes de Chiquita

Un jury fédéral de Floride vient d’estimer que la multinationale Chiquita Brands, spécialisée dans les fruits, était responsable financièrement d’assassinats de paysans en Colombie de 1997 à 2004.

La culture des fruits tropicaux, leur mise en boîte de conserve et leur commercialisation ont fait la fortune des actionnaires de cette grande entreprise, fondée en 1899 en tant que United Fruit Company, et qui a deux sièges mondiaux : l’un en Floride et l’autre en Suisse. En 1989, elle a éprouvé le besoin de changer de nom pour se laver des crimes commis durant tout le 20e siècle en Amérique latine : financement de coups d’État, liens avec des dictateurs qui assuraient la profitabilité de ses plantations, organisation d’assassinats d’opposants, etc.

En Colombie, Chiquita a financé les paramilitaires des AUC qui tuaient tous ceux, simples paysans ou syndicalistes, qui s’opposaient à la dictature patronale. Elle a reconnu leur avoir donné plusieurs millions de dollars pour faire régner leur ordre sanglant dans une zone où se situaient ses plantations, même après que les AUC avaient été déclarées « organisation terroriste » en 2001 par le gouvernement des États- Unis.

En reconnaissant sa culpabilité et en payant 25 millions de dollars d’amende en 2007, Chiquita a échappé à un procès pénal pour meurtre. Mais les familles des 5 000 paysans colombiens tués pour que Chiquita puisse racheter leurs terres à bas prix n’ont pas voulu en rester là. Leurs avocats ont déposé des dossiers d’indemnisation, dont huit viennent d’aboutir à la condamnation de Chiquita à leur verser 38,3 millions de dollars en dommages et intérêts.

D’autres procès de ce type vont suivre. Peut-être aboutiront-ils aussi à des condamnations, bien que Chiquita ait fait appel et compte sur le soutien de longue date des autorités américaines. En effet, celles-ci n’ignorent rien des méthodes des géants capitalistes dans leur « arrière-cour » latino-américaine. Ainsi, en 1928, l’ambassadeur américain en Colombie rapportait en ces termes à son ministre à Washington la tournure prise par une grève dans des plantations colombiennes : « J’ai l’honneur de vous faire savoir que le représentant à Bogota de l’United Fruit Company m’a dit hier que le nombre de grévistes tués par l’armée colombienne [équipée et entraînée par les États-Unis] excédait un millier. »

En son temps, Marx écrivait que « le capital […] sue le sang et la boue par tous les pores ». Il n’a pas été démenti depuis…

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