- Accueil
- Lutte ouvrière n°2917
- Algérie : manifestations pour l’eau à Tiaret
Dans le monde
Algérie : manifestations pour l’eau à Tiaret
En Algérie le 14 juin, lors de la fête de l’Aïd-el-Kébir et alors que les températures atteignaient 50 degrés, la population de la wilaya de Tiaret, excédée par les pénuries d’eau potable, a laissé éclater sa colère. Des barrages érigés par les habitants ont bloqué toutes les routes conduisant à la ville.
Dans cette région agricole, située sur les hauts plateaux à 280 km au sud-ouest d’Alger, une sécheresse terrible sévit depuis deux ans. En raison du manque de pluie, les nappes phréatiques ne se rechargent plus, les cours d’eau et le barrage de Ben Khedda, seule source d’approvisionnement de la zone, sont à sec. La population subit de plein fouet les conséquences du changement climatique, mais ce sont les mensonges et le mépris du pouvoir qui ont déclenché les émeutes.
La colère couvait depuis la mi-mai, depuis qu’ aucune goutte d’eau ne coulait plus du robinet. Fin mai, pour désamorcer la contestation, des responsables locaux, qui avaient pourtant alerté le ministre de l’Hydraulique de la gravité de la situation, ont été limogés. Le 2 juin, le président Abdelmadjid Tebboune a dépêché ses ministres, qui ont promis de régler le problème avant la fête de l’Aïd. Mais, à la veille de celui-ci, dans de nombreux endroits les robinets restaient désespérément secs.
Le sentiment d’avoir été lanternés a décuplé la colère, pendant que les routes se hérissaient de barrages. À Rahouia, à 40 km de Tiaret, des manifestants ont assiégé le siège du district où se trouvait le préfet. Celui-ci s’est caché lorsque les protestataires ont refusé de lui envoyer des représentants, exigeant qu’il rende des comptes à tous.
Bien que les médias nationaux aux ordres du pouvoir se soient gardés de relayer l’événement, des vidéos amateurs ont largement circulé sur les réseaux sociaux. Tebboune a donc dû réagir vite et son ministre des Ressources hydrauliques a dû s’excuser pour les promesses non tenues. Il a annoncé pour l’avenir l’acheminement de l’eau des grands barrages situés plus au nord et au sud de Tiaret, ainsi que la construction de nouvelles usines de dessalement.
En attendant, une noria de camions citernes apporte de l’eau dans la ville. Les citernes étanchent la soif. Mais elles sont loin d’étancher la colère, tant les prix sont insupportables pour les classes populaires qui, pour s’approvisionner, doivent débourser jusqu’à 5 000 dinars (25 euros), soit le quart du salaire minimum !
Alors que Tebboune est sur le point d’annoncer sa candidature à l’élection présidentielle qu’il a avancée au 7 septembre, cette contestation inattendue lui montre que les lois qu’il a fait adopter pour mettre au pas la population n’empêcheront pas la colère sociale de s’exprimer.