Ukraine : le Noël de Zelensky27/12/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/12/2891.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Ukraine : le Noël de Zelensky

À peine le Conseil européen avait-il décidé, mi-décembre, d’ouvrir les négociations sur l’adhésion à venir (ou pas) de l’Ukraine à l’Union européenne (UE), que le président ukrainien Zelensky avait crié victoire, espérant que la population lui en attribue le mérite.

Il est vrai que, sur le front, l’heure est à tout sauf à la victoire, de l’aveu même des plus hauts gradés ukrainiens. Un journaliste du New York Times affirme même que le chef d’état-major ukrainien négocie les conditions d’un cessez-le-feu avec son homologue russe, malgré l’opposition de Zelensky.

Quand ce dernier déclare qu’il ne veut pas mobiliser les femmes, mais « seulement » 500 000 hommes supplémentaires et « pas immédiatement » mais au cours de l’année qui vient, il n’y a rien là de bien rassurant. En tout cas, ce n’est pas cela qui pourra faire cesser les manifestations de mères et de compagnes de soldats qui, depuis des mois, ont lieu chaque semaine dans les grandes villes, y compris à Kiev sur la place du Maïdan, réclamant leur retour à la maison.

Zelensky, qui n’a pas oublié qu’il avait débuté comme acteur, a sorti une nouvelle carte de sa manche. Il a décrété que, à dater de 2023, l’Ukraine fêterait Noël non plus le 7 janvier mais le 25 décembre, comme l’Europe de l’Ouest. En effet, à la fin du 16e siècle, l’Église orthodoxe, qui dominait l’empire tsariste de toutes les Russies, y compris la majeure partie de l’Ukraine, n’avait pas, à la différence des Églises catholique et protestantes, adopté un nouveau calendrier plus proche de l’année astronomique. Résultat : même si depuis la révolution de 1917 l’Ukraine et la Russie ont adopté ce qui est le calendrier plus ou moins universel, les fêtes orthodoxes y affichaient un décalage calendaire croissant avec leurs pendants chrétiens occidentaux.

L’immense majorité des Ukrainiens se moquent bien de la chose. Ou plutôt, comme beaucoup de Russes, ils avaient parfois, depuis la fin de l’URSS, pris l’habitude de célébrer Noël et le Nouvel An selon les deux calendriers, donc d’étaler sur près d’un mois les festivités ! Zelensky, lui, y a vu une double occasion. En brisant un nouveau lien symbolique avec la Russie, l’Église orthodoxe ukrainienne ayant déjà rompu avec le patriarcat de Moscou en 2019, il réaffirme qu’il se tourne résolument vers l’Occident.

Cela n’a bien sûr pas empêché les drones russes de frapper à nouveau des grandes villes pour ce Noël « européanisé ». Quant aux choix pro-occidentaux de Zelensky, les obstacles à leur réalisation n’ont pas disparu.

L’ex-ambassadeur américain en Ukraine, William Taylor, vient de déclarer que, pour adhérer à l’OTAN, celle-ci devait l’emporter dans la guerre actuelle. Or ce n’est pas demain la veille. Quant à l’entrée dans l’UE, elle a toujours comme première condition que Kiev jugule la corruption endémique du régime. Cela ressemble à une mission impossible.

Rien que fin décembre, la justice a laissé en liberté un député du parti de Zelensky et homme d’affaires, qu’on avait pourtant interpellé en train de toucher un premier versement sur la vente de terrains appartenant à l’Académie des sciences. Compréhensifs, les juges ont divisé par trois sa caution, afin qu’il puisse revenir au Parlement gérer les affaires du pays ! Nouvel exemple : un tribunal de Kiev a innocenté un autre député qui a grugé le fisc de 2,4 millions d’euros sur la vente de 158 logements.

Dans le même temps, une femme a pris cinq ans de prison pour avoir volé 8 kilos de saindoux : avec la guerre, a-t-elle dit, elle n’avait plus de quoi se nourrir. D’évidence, elle avait encore moins de quoi acheter juges et policiers.

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