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Dans les entreprises
Uber Eats : en grève contre l’exploitation
Les livreurs à vélo des plateformes comme Uber-Eats étaient appelés à la grève le week-end des 2 et 3 décembre. Ils se sont rassemblés dans 52 villes pour protester contre la dégradation de leurs conditions de travail et de salaire.
Rien que chez Uber Eats, près de 65 000 livreurs chargent les repas dans des restaurants ou des cuisines pour les apporter aux particuliers. Ce sont des autoentrepreneurs qui, à ce titre, n’ont pas de couverture sociale, doivent entretenir leur vélo ou leur scooter et n’ont aucune protection en cas d’accident pendant leur temps de travail. Bien des jeunes, et parfois des immigrés sans papiers, ont pris ce travail, parfois attirés par le fait de ne pas avoir un chef sur le dos et de pouvoir travailler quand ils veulent, en somme l’apparence de la liberté, mais surtout parce qu’ils n’avaient pas d’autre choix. Et dans les faits ils sont tout autant prisonniers des patrons de la plateforme que s’ils étaient salariés, sans avoir les quelques protections que peut garantir un contrat de travail.
En novembre dernier, Uber Eats a mis en place une nouvelle grille de rémunération, et l’a testée dans quelques grandes villes comme Lille et Rouen. Cette grille était censée être plus juste, puisqu’elle prenait en compte l’ensemble du temps travaillé par le livreur, y compris l’attente au restaurant ou chez le client. Mais c’était seulement sur le papier. Comme l’a avoué un responsable d’Uber Eats, « cette grille peut faire varier certaines courses à la hausse et d’autres à la baisse ». Dans la réalité, les livreurs auxquels elle a été appliquée ont immédiatement constaté une baisse de leurs revenus d’au moins 15 % et parfois jusqu’à 40 %. Constatant qu’il leur fallait travailler toujours plus pour gagner moins, ils ont alerté leurs collègues des autres villes avant que cette nouvelle grille soit généralisée sur tout le pays, ce qui devait intervenir en décembre. La grève a donc été décidée et organisée.
Dans ce secteur, le patronat a renoué avec les méthodes des débuts du capitalisme, quand les travailleurs attendaient pour voir ceux auxquels les patrons voudraient bien donner un travail payé à la tâche. Le fait qu’il le fasse avec les outils modernes de l’informatique ne change rien au fait que c’est une régression. Mais les livreurs, eux, n’ont pas été longtemps dupes de la fiction de liberté qu’on leur faisait miroiter. Malgré leur dispersion et la crainte de se voir déconnectés, un mot d’Uber Eats correspondant à celui de licenciés, ils ont renoué avec la méthode de toujours de la classe ouvrière, la grève.