Face à ce drame récurrent, le gouvernement pointe la responsabilité des parents. Sa campagne de prévention diffusée à la télévision affiche le slogan « Vous tenez à eux, ne les quittez pas des yeux ». Cette leçon de morale sert à masquer la culpabilité de l’État dans cette situation. Car si des jeunes et des moins jeunes se noient chaque été, c’est d’abord parce qu’ils ne savent pas nager.

Pourtant l’apprentissage de la natation est entré dans les programmes scolaires comme une « priorité nationale » depuis plus de dix ans. Mais de l’affichage à la réalité, il y a un gouffre. Un enfant sur cinq ne sait pas nager à la sortie de l’école primaire. Et dans les familles ouvrières, la proportion est plus grande encore. En Seine-Saint-Denis, sept enfants sur dix entrent en sixième sans avoir appris à nager, d’après une enquête de 2021.

À qui la faute ? Pour que toute une génération apprenne à nager, il ne suffit pas d’écrire un paragraphe dans un programme scolaire, il faut encore des piscines en nombre suffisant, et elles manquent en particulier dans les communes populaires. Il y en a seulement 37 dans tout le département de Seine-Saint-Denis qui compte 1,6 million d’habitants, soit un ratio quatre fois inférieur à la moyenne nationale. Résultat, des dizaines d’écoles et de collèges doivent se partager le même bassin, avec des créneaux horaires insuffisants. Et la situation ne risque pas de s’améliorer car de plus en plus de villes ferment leurs piscines ou réduisent les horaires d’ouverture, ne pouvant plus assumer les dépenses croissantes de fonctionnement.

Construire et entretenir des piscines, en embauchant des milliers de maîtres-nageurs, ce serait une évidence si l’on voulait combattre l’insuffisante maîtrise de la natation et ses conséquences dramatiques. Il s’agirait d’une dépense bien dérisoire en comparaison des milliards versés chaque année aux capitalistes en tout genre.