Grenoble : microélectronique et économie de guerre31/05/20232023Journal/medias/journalarticle/images/2023/05/P15-1_OK_Lupo.jpg.420x236_q85_box-0%2C74%2C800%2C524_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Grenoble : microélectronique et économie de guerre

Un article du Dauphiné libéré, reprenant une étude d’une officine britannique, a révélé l’utilisation dans des armes de guerre russes de pièces élaborées dans la région grenobloise par des entreprises, dont STMicroelectronics, Soitec ou Lynred.

Illustration - microélectronique  et économie de guerre

Cette dernière, contrôlée maintenant par Thales et Safran, avait déjà été épinglée l’an passé, avec d’autres industriels de l’armement, pour avoir vendu entre 2015 et 2020 des capteurs infrarouges, pour un montant de cinq millions d’euros, à une société russe. Son PDG s’était défendu en expliquant que les contrats ayant été signés avant l’embargo décrété en 2014 contre la Russie, ils devaient être honorés, et les profits empochés par conséquent. Aujourd’hui, des équipements grenoblois ont de nouveau été retrouvés dans des chars ou des drones de surveillance russes. Toute guerre a ses profiteurs.

Mais les rédacteurs de l’étude britannique, complaisamment relayée, n’évoquent à dessein que les armes russes. Ils dénoncent les industriels de la microélectronique comme des « rouages d’un système tentaculaire et criminel » fournissant des composants « au cœur de la machine de guerre russe ». C’est passer sous silence le fait que les industriels français de l’armement sont aux premières places mondiales, qu’ils fournissent les pires dictateurs de la planète, leurs sales guerres ainsi que celles menées par l’armée française, notamment en Afrique, depuis des décennies.

En fait, l’interpénétration du secteur de l’armement et des autres secteurs de l’industrie, comme celui de la finance, est totale et n’est pas nouvelle. Les industries chimiques de l’agglomération grenobloise sont d’ailleurs nées durant la Première Guerre mondiale, pour fournir l’armée française en gaz de combat !

Pour rester dans le domaine actuel de la microélectronique, il est évident que l’armée se fournit en capteurs, en calculateurs, en systèmes GPS, etc. auprès des industriels. Chacun d’eux possède un département dévolu aux applications militaires pour pouvoir profiter de ce marché très rentable. Nombre de composants peuvent en outre être utilisés tant pour des applications civiles que militaires, et les industries de l’agglomération accaparent une large part de ce marché. Un responsable de l’Observatoire des armements, une association pacifiste, constate ainsi : « Le “cerveau” de l’armement, ce qui lui permet de désigner des cibles ou de tracer des gens, est largement fabriqué dans l’écosystème grenoblois. En France, si on coupait l’activité du territoire grenoblois, l’armement ne pourrait plus réfléchir. »

Une fraction croissante de l’économie est une économie de guerre et le commerce des armes enrichit les actionnaires de Dassault, Thales, Airbus, MBDA, Naval Group ou Nexter. La façon dont cette société utilise les mains et les cerveaux pour des tâches de destruction suffit à la juger.

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