Pénurie de pilule abortive : une menace contre le droit d’avorter19/04/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/04/2855.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Pénurie de pilule abortive : une menace contre le droit d’avorter

Le misoprostol, un médicament utilisé dans l’avortement médicamenteux (la pilule abortive) en association avec le mifépristone, est actuellement quasiment introuvable à Lille et en Île-de-France.

Cette pénurie crée une situation dramatique pour les femmes qui veulent avorter, car les avortements médicamenteux ont représenté 76 % des avortements en 2021. De plus, le misoprostol est aussi utilisé dans les avortements non médicamenteux et la prise en charge des fausses couches. Mais, face aux demandes d’associations réclamant une intervention d’urgence du gouvernement « pour protéger le droit à l’avortement », le ministre de la Santé, François Braun, est aux abonnés absents.

Pour ce médicament comme pour bien d’autres, la logique de la production capitaliste expliquerait cette pénurie. Le misoprostol étant toujours protégé par son brevet, il n’existe pas de génériques et il est produit par un seul laboratoire à l’échelle mondiale, Nordic Pharma. Celui-ci explique qu’il se heurte à des problèmes techniques, d’où des retards de production. Cet argument a déjà été utilisé à chaque pénurie de médicaments, antibiotiques, anticancéreux ou antiépileptiques. On se rappelle encore la pénurie de paracétamol qui amenait les pharmaciens à délivrer cet antalgique sur la base du nombre de comprimés pour un traitement. À chaque fois, derrière des explications techniques (baisse de production, difficultés d’approvisionnement etc.) on retrouve les choix financiers des trusts qui produisent à flux tendu pour vendre plus cher aux plus offrants.

Mais, dans le cas de la pilule abortive, aux problèmes de fabrication s’ajoutent des problèmes politiques, les opposants à l’avortement étant bien décidés à interdire son utilisation. On vient de voir comment, aux USA, un juge fédéral du Texas a proposé d’interdire l’autre médicament, le mifépristone, et a été soutenu par toutes les ligues et associations anti-avortement, heureusement sans succès pour le moment. En France, la situation n’est finalement pas meilleure, alors même que le gouvernement parle de faire inscrire l’IVG dans la Constitution. Avec cette pénurie, c’est tout simplement l’accès à l’avortement médicamenteux qui devient difficile voire impossible.

En 1990, Étienne-Émile Baulieu, l’inventeur de la pilule abortive, déclarait que ce dispositif serait la garantie que l’avortement ne serait plus un problème. Plus de trente ans après, il l’est malheureusement toujours et ses opposants ne renoncent pas. Heureusement face à ces réactionnaires de tout poil, religieux et autres, des femmes et des hommes toujours aussi nombreux se battent pour ce droit élémentaire.

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