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Leur société
Marseille : le calvaire des délogés
À 0 h 46, dimanche 9 avril, huit personnes ont été tuées par l’effondrement de l’immeuble du 17, puis celui du 15, rue de Tivoli, suite à une très puissante explosion sans doute due au gaz. Quarante-deux immeubles ébranlés par la catastrophe et devenus dangereux ont été vidés de leurs habitants, soit plus de 300 personnes.
La plupart des évacués ont pu trouver un gîte chez un ami ou dans leur famille, 98 ont été pris en charge par la Ville, logées dans un hôtel. Les rues adjacentes ont été fermées, mises sous étroite surveillance. Ce n’est que casque sur la tête et accompagnés d’un marin-pompier et d’un policier municipal, que les habitants sont autorisés à retourner prendre quelques objets et papiers qui leur sont indispensables.
Tous ont beaucoup de problèmes à gérer, ne serait-ce qu’avec leur assurance ou leur crédit. Certes un collectif d’avocats s’est mis à leur disposition, ainsi que plusieurs associations, mais les évacués sont évidemment loin d’avoir résolu toutes les difficultés, dont la principale est de trouver un nouveau logement.
Dans cette galère les sinistrés de la rue de Tivoli ont été précédés par les habitants évacués après l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne où huit personnes avaient perdu la vie le 5 novembre 2018. Suite à cela, de nombreux immeubles de Marseille ont été déclarés en péril et leurs habitants évacués en urgence se sont retrouvés eux aussi sans logement : sur les 4 000 délogés en 2019, 1 230 étaient toujours sans logement durable en novembre 2022. Un avocat a dénoncé cet état de fait dans le journal La Marseillaise : « Des personnes restent dans un no man’s land. Elles se retrouvent évacuées, relogées par la Soliha (organisme chargé pour la Ville du relogement des délogés) et sous le coup d’une procédure d’expulsion... de la Soliha. »
Cette catastrophe a mis aussi en évidence le grand nombre de logements insalubres, indignes voire dangereux, ainsi que les multiples problèmes de propriété des appartements ou des immeubles, certains aux mains de marchands de sommeil ou dans des copropriétés très dégradées où des propriétaires qui y demeurent n’ont pas les moyens d’engager les travaux nécessaires. À cela s’ajoute la complexité des situations et des procédures juridiques. Selon une avocate de propriétaires de la rue d’Aubagne, « on stigmatise les propriétaires privés mais tous ne sont pas des marchands de sommeil, on les exproprie à un prix dérisoire alors que depuis trois ans, ils auraient pu, avec les aides de l’État, réaliser les travaux de réhabilitation demandés. »
Même si la mairie assure la cantine scolaire gratuite et d’autres aides, les délogés du quartier de la rue de Tivoli peuvent donc craindre de le rester longtemps. Une femme citée par La Marseillaise, qui avait dû quitter son logement de la rue d’Aubagne et qui, depuis quatre ans, enchaîne avec sa fille les logements temporaires les prévient. Elle sait « combien c’est compliqué et ce que vont endurer les personnes ».