Pour les soigner les médecins leur prescrivent de plus en plus de psychotropes, des médicaments qui agissent sur le psychisme. Entre 2014 et 2021 ces prescriptions ont augmenté de 49 % pour les médicaments antipsychotiques, de 63 % pour les antidépresseurs et de 155 % pour les hypnotiques et sédatifs.

Des dizaines de milliers d’enfants sont concernés, près d’un sur vingt d’après le rapport, qui précise que cette augmentation est beaucoup plus rapide que chez les adultes. En outre, elle est encore plus nette ces dernières années : pour la seule année 2021, en pleine crise du Covid, l’augmentation a été de 224 % pour les hypnotiques et de 23 % pour les antidépresseurs…

Les prescriptions de psychotropes explosent parce que les enfants sont de plus en plus mal pris en charge. Alors que les autorités de santé recommandent d’abord une prise en charge psychothérapeutique puis seulement ensuite une prise en charge médicamenteuse, c’est l’inverse qui se produit. En effet seuls 30 % des enfants voient des pédiatres en ville ou à l’hôpital avec des délais de consultation au minimum de 6 à 18 mois. Quant aux centres médicaux pédagogiques (CMP) leurs consultations ont été divisées par quatre. On ne comptait plus au 1er janvier 2020 que 597 pédopsychiatres, âgés en moyenne de 65 ans, alors que 420 sont partis en retraite sans être remplacés entre 2010 et 2021.

Pour soulager la situation difficile de leurs enfants et leur famille, les parents en sont réduits à se tourner vers leur généraliste, et celui-ci prescrit des psychotropes faute de pouvoir leur proposer une prise en charge psychologique. Le rapport dénonce aussi une situation d’autant plus grave que la plupart de ces médicaments psychotropes ne sont pas conçus pour des enfants et n’ont pas obtenu d’autorisation de mise sur le marché en pédiatrie. Ils sont donc proposés de façon inappropriée dans 40 % des cas en ville et jusqu’à 94 % à l’hôpital…

Au final, le rapport note « une aggravation de l’état de santé des enfants… une augmentation des hospitalisations en urgence et des suicides ». C’est le résultat inévitable d’une politique d’austérité qui concerne aussi bien les structures pédiatriques que l’ensemble de la santé, hôpitaux, cliniques et médecine de ville. La crise du Covid qui a bien sûr bouleversé la vie de millions d’enfants, et même aujourd’hui la guerre en Ukraine peuvent contribuer à expliquer cette situation, mais c’est dans la casse de la médecine et le manque de moyens pour prendre en charge ces enfants qu’il faut en chercher les véritables causes. Une société incapable de soigner ses enfants est une société vraiment malade.