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Stade de France : les “hooligans” étaient le ministre et le préfet
Le rapport d’une commission indépendante de l’UEFA vient de revenir sur la façon dont, le 28 mai 2022, la finale de la Ligue des Champions s’est déroulée au Stade de France à Saint-Denis.
Les supporteurs des deux équipes, Liverpool et le Real Madrid, avaient été non seulement agressés et détroussés par des voyous, mais aussi coincés dans des goulets d’étranglement, aspergés de gaz lacrymogènes par la police, et menacés d’écrasement à plusieurs reprises. On passa très près de bousculades mortelles aux abords du stade avant la rencontre. Dans les jours qui suivirent, le ministre de l’Intérieur, Darmanin, dénonça « une fraude massive, industrielle et organisée de faux billets », qui aurait obligé les autorités à multiplier les contrôles.
À Madrid et à Liverpool, la nouvelle de ces incidents avait suscité beaucoup de colère. À Liverpool, la soirée en rappelait une autre, celle du stade de Hillsborough le 15 avril 1989, quand 97 supporteurs étaient morts dans une bousculade causée par l’incurie de la police. Les autorités ne s’étaient alors pas excusées et avaient rejeté la faute sur les supporteurs eux-mêmes, accusés d’être des hooligans. Trente-trois ans plus tard, l’histoire se répétait. Et, si elle a été moins tragique, c’est d’abord grâce à la solidarité dont les supporteurs ont fait preuve et à leur discipline collective.
Le rapport de la commission indépendante de l’UEFA le confirme et accable les autorités françaises. Pendant la préparation de la rencontre, celles-ci étaient obsédées par la « menace hooligan ». Il y avait en réalité peu de faux billets, et pas du tout de hooligans. En arrivant au stade depuis le RER, des milliers de supporteurs étaient contrôlés au bout d’un tunnel piétonnier, devant souvent patienter pendant plusieurs heures. Alors que, redoutant une bousculade, ils suppliaient les policiers de fluidifier le passage, ils se heurtaient à des refus catégoriques. Quand, enfin, le passage a été débloqué et qu’ils ont pu approcher du stade, ils ont été aspergés de gaz au poivre. À la fin du match, en revanche, les forces de police n’étaient pas présentes sur le chemin du retour, où de nombreux supporteurs se faisaient dépouiller par des délinquants. Cependant, comme les autorités étaient convaincues d’un risque d’« invasion massive » de la pelouse, des centaines de policiers en gardaient l’accès.
Au fond, les supporteurs du Stade de France ont été témoins et victimes de la haine dont Darmanin et la préfecture de police, alors dirigée par le sinistre Didier Lallement, pouvaient faire preuve contre une foule populaire ; cette haine dont bien des manifestants, des travailleurs et notamment des gilets jaunes, ont également fait l’expérience.