Burkina Faso : l’hostilité envers l’impérialisme français explose05/10/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/10/2827.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Burkina Faso : l’hostilité envers l’impérialisme français explose

Vendredi 30 septembre, au Burkina Faso, le capitaine Ibrahim Traoré a renversé par les armes le lieutenant-colonel Damiba, qui s’était emparé du pouvoir de la même manière en janvier dernier. Ce coup d’État a été accompagné de manifestations populaires qui s’en sont prises aux symboles de la présence française.

L’incapacité de Damiba à débarrasser le pays des groupes armés djihadistes est la principale raison invoquée par les putschistes. Au Burkina, un habitant sur dix a dû fuir le lieu où il habitait. 40 % du territoire est aujourd’hui contrôlé par ces groupes armés qui y imposent leur loi moyenâgeuse. Le 26 septembre, un convoi escorté par des militaires qui devait ravitailler la ville de Djibo, a été anéanti par les djihadistes. Ceux-ci ont tué 11 militaires et 50 civils, et brûlé les centaines de tonnes de nourriture qui étaient destinées à cette ville assiégée depuis sept mois et qui n’arrive plus à se nourrir.

Lorsqu’il avait renversé en janvier le président Roch Marc Christian Kaboré, Damiba avait promis de débarrasser le pays de l’insécurité, mais comme l’ont d’emblée déclaré les putschistes, « loin de libérer les territoires occupés, les zones jadis paisibles sont passées sous contrôle terroriste ». Le contingent militaire français présent dans le pays partage avec le président déchu l’hostilité de la population car rien ne peut justifier aux yeux des Burkinabè la présence d’une force armée étrangère incapable de mettre fin à l’état de guerre.

Une autre raison du discrédit si rapide de Damiba dans la population, et même dans l’armée, est sa volonté de ramener dans les allées du pouvoir l’ancien dictateur Blaise Compaoré et ses partisans. Pendant 27 ans, celui-ci a été l’âme damnée de l’impérialisme français dans la région, l’allié de Paris dans tous ses mauvais coups sur le continent, en même temps qu’il pillait les maigres richesses du pays au profit de son clan et faisait régner la terreur grâce à une armée de tortionnaires. En 2014, un puissant mouvement populaire avait renversé Compaoré et l’armée française s’était chargée de l’exfiltrer vers la Côte d’Ivoire.

Le coup d’État ne s’est cependant pas borné à une opération militaire. Des manifestations populaires l’ont accompagné, pour soutenir les putschistes mais aussi pour dénoncer l’impérialisme français. Les manifestants ont tenté d’incendier l’ambassade de France, ainsi que les centres culturels français dans la capitale et à Bobo-Dioulasso, la deuxième ville du pays. Des jeunes ont saccagé des enseignes du trust Bolloré et plusieurs stations-service Total. Cette haine de l’impérialisme français est la même que celle qui s’est exprimée au Mali, et sur laquelle des militaires putschistes se sont appuyés pour s’emparer du pouvoir et obliger les soldats français à plier bagage.

Au Niger aussi, des manifestations ont eu lieu pour exiger le départ du contingent français. Dans tous ces pays, des drapeaux russes sont brandis pour faire pièce à ceux de la France, et cela mesure l’exaspération de la population, même si remplacer une bande armée par une autre ne la protègera en rien, et si les miliciens russes de Wagner au Mali s’avèrent déjà tout aussi impuissants face aux djihadistes que les hommes de Barkhane.

Les nouveaux dirigeants du Burkina n’ont pas encore exigé le départ des troupes françaises, mais promettent déjà une « diversification des alliances », en regardant vers la Russie. Les militaires burkinabè, comme ceux du Mali, chevauchent aujourd’hui la haine accumulée contre l’impérialisme français, même s’ils ne sont certes pas les amis des travailleurs et n’hésiteront pas à les combattre violemment.

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