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Leur société
TotalEnergies : le pyromane joue au pompier
Alors que le prix du carburant continue de s’envoler, avec le litre à plus de 2 euros, le patron de TotalEnergies a annoncé une ristourne de 20 centimes par litre à partir du 1er septembre.
Cette réduction passerait à 10 centimes au 1er novembre. Elle s’ajoutera à la ristourne de 18 centimes financée par le gouvernement qui souhaite la remplacer par un autre système de subvention. Bruno Le Maire a aussitôt salué « une mesure juste, forte et bonne pour les consommateurs ». Pouyanné, le PDG de Total, n’a pourtant rien d’un bienfaiteur de l’humanité ! Son annonce, juste avant la publication des résultats du groupe pour le deuxième trimestre, est un contre-feu et un coup de publicité.
Depuis des semaines, la question d’une taxe exceptionnelle sur les superprofits des entreprises de l’énergie agite les dirigeants politiques de toute l’Europe. Il faut dire que de tels profits choquent quand la population doit se restreindre. En 2021, les cinq majors pétrolières (Exxon, Chevron, Shell, BP et TotalEnergies) ont encaissé 80 milliards de dollars de profits, à peu près la même somme en euros, dont 16 milliards pour la compagnie française Total. Au premier trimestre de cette année, Total a déjà engrangé 5 milliards d’euros, sa concurrente anglo-néerlandaise Shell, 9 milliards. Ces superprofits sont redistribués à leurs actionnaires, sous forme de dividendes ou de rachats de leurs propres actions pour en faire monter la valeur. Ainsi Shell en a racheté pour 8,5 milliards de dollars au premier semestre 2022.
En France, la taxe exceptionnelle a été écartée de la loi sur le pouvoir d’achat car Macron et Le Maire y sont hostiles. Ils se contentent de demander, poliment, aux entreprises de l’énergie, ainsi qu’au transporteur maritime richissime CMA-CGM, de « faire un effort sur les prix ». Mais beaucoup de députés, y compris certains macronistes, envisageaient d’y revenir dans la loi de finances en discussion à l’Assemblée. En prenant les devants, sans doute après avoir négocié avec Le Maire, Pouyanné espère éviter une telle taxe, tout en jouant les grands seigneurs. En mars, il avait déjà accordé une réduction de 10 centimes par litre dans quelques stations-service et un chèque de 100 euros à quelques milliers de ses clients du gaz les plus précaires.
Même une éventuelle taxe exceptionnelle serait dérisoire. Les compagnies énergétiques ne profitent pas seulement de la flambée des prix : elles l’orchestrent. Chaque événement, guerre en Ukraine, tempête violente, fermeture du canal de Suez, leur sert de prétexte pour spéculer sur la montée des prix. En mettant plus ou moins de pétrole sur les marchés, en ouvrant ou fermant les vannes de leurs raffineries, les compagnies pétrolières, plus puissantes que les États, jouent un rôle majeur dans la spéculation. À la pompe, les prix de vente varient quotidiennement, plus vite à la hausse qu’à la baisse, alors que le carburant distribué a été pompé, acheté et raffiné des mois auparavant, quand le baril coûtait moins cher. Le coût de production du baril de pétrole étant, pour Total, entre 45 et 50 dollars, la compagnie encaisse des surprofits quand le prix du baril dépasse ces valeurs. Les profits faramineux des compagnies pétrolières proviennent de cette spéculation et de l’exploitation des travailleurs de tout le secteur pétrolier.
Pour contrôler vraiment le prix de vente et les conditions de production de l’énergie, les travailleurs devront exproprier complètement, sans indemnité ni rachat, les grandes entreprises qui la produisent.