- Accueil
- Lutte ouvrière n°2801
- Pécresse : où s’arrête l’oligarchie ?
Leur société
Pécresse : où s’arrête l’oligarchie ?
Valérie Pécresse, candidate de droite à l’Élysée, a fait le 15 mars une proposition qu’elle considère elle-même comme audacieuse : loger les réfugiés ukrainiens dans les résidences confisquées aux oligarques russes. Elle ne sait pas combien l’idée mérite d’être développée !
Puisqu’il serait somme toute moral de loger les réfugiés ukrainiens dans les propriétés mal acquises par les oligarques russes, pourquoi s’arrêter en chemin ? Il y a des riches voleurs de toutes les nationalités et sous toutes les latitudes. Ils possèdent de vastes propriétés, le plus souvent vides, partout dans le monde et dans les plus beaux paysages de France par exemple.
Il y a pareillement des migrants de tous les pays, des mal-logés et des SDF, français ou non, avec ou sans papiers, qui ne demandent qu’un toit. Combien d’entre eux pourrait-on mettre au chaud dans les châteaux de la famille Dassault, les manoirs de Bolloré, les palaces de Bernard Arnault, les résidences de François Pinault et jusqu’aux demeures plus modestes évidemment, mais ouvertes de bon cœur n’en doutons pas, de Valérie Pécresse ?
Pourtant, alors même que cette dernière venait enfin, après trente ans de vie publique, de découvrir comment soulager immédiatement la misère de millions de mal-logés de ce pays, sa proposition n’a pas fait florès. Ni les médias ni ses concurrents n’ont abondé dans son sens. Et elle-même n’y est pas revenue.
Saisir sans contrepartie les biens des possédants pour soulager ceux qui n’ont rien est une opération des plus rares. Les révoltés du Moyen Âge l’ont tenté à maintes reprises. Ils commençaient par éventrer les gras évêques, avant de finir eux-mêmes étripés, roués, brûlés vifs par les soudards des nobles. On peut aussi citer Saint-Just, commissaire à l’armée du Rhin en 1794, exigeant qu’on prenne, sous 24 heures, dix mille paires de souliers aux aristocrates de Strasbourg pour chausser les soldats de la République qui combattaient pieds nus. Il fut guillotiné peu après. À Paris en 1871, les communards avaient réquisitionné logements et ateliers, vivres et vêtements des propriétaires réfugiés à Versailles. Les ancêtres de madame Pécresse les ont fait fusiller. La Révolution russe a exproprié les possédants, à l’échelle d’un continent et pour longtemps. Les Pécresse de tous les pays en tremblent encore.
Valérie Pécresse s’abrite derrière le fait que les oligarques russes, pas en odeur de sainteté actuellement, sont des voleurs, des menteurs, des pilleurs de fonds publics. Mais elle oublie que c’est le cas de tous les grands propriétaires de cette terre, à commencer par les bons capitalistes légaux et certifiés de l’Ouest parisien et de la banlieue chic qui sont ses terres d’élection.
Dans ces milieux, poser la question des biens mal acquis, c’est au moins manquer de savoir-vivre. On devrait tout de même le savoir lorsqu’on a, comme Pécresse, fait ses études à l’ENA et que l’on s’est dépensée de cabinets ministériels en salons bourgeois.