Moins de quarante-huit heures après l’invasion russe, un stock d’une bonne dizaine de milliers de missiles antiaériens ou antichars, Stinger ou Javelin, stockés sur les bases américaines en Allemagne, a été expédié en Ukraine via la Pologne. Depuis huit ans, la guerre au Donbass a en effet déjà permis de former les militaires et les miliciens ukrainiens au maniement de ces armes. Le 10 mars, le Congrès américain adoptait un budget de 14 milliards de dollars en faveur de l’Ukraine, pour financer des opérations humanitaires mais surtout la fourniture d’armes. Le 16 mars, Biden annonçait une rallonge d’un milliard pour « aider l’Ukraine à se doter de systèmes de défense antiaérienne supplémentaires et de plus longue portée », en particulier des drones, aussi efficaces que coûteux. De son côté, l’Union européenne a autorisé le prélèvement de 450 millions d’euros puis finalement d’un milliard sur son budget communautaire pour mutualiser le coût des armes que les pays européens envoient à l’Ukraine.

Ces annonces récurrentes ont bien sûr un objectif politique : elles permettent aux dirigeants occidentaux de montrer qu’ils soutiennent totalement Zelensky et la résistance de l’Ukraine, au nom de la défense du droit des peuples, sans entrer frontalement en guerre contre la Russie. Mais les livraisons d’armes sont réelles et massives. Elles montrent que les dirigeants des États-Unis et de l’OTAN font la guerre à Poutine par le peuple ukrainien interposé. Ils fournissent les armes et les Ukrainiens les combattants et les morts. Le fait que ces livraisons d’armes sont demandées par Zelensky et approuvées par beaucoup d’Ukrainiens qui subissent les tirs mortels et les destructions de l’armée russe n’y change rien.

L’invasion russe n’a pas fait disparaître les classes sociales ni leurs divergences d’intérêt. Zelensky a été porté au pouvoir par les oligarques qui pillent le pays depuis des décennies et la guerre renforce l’armée et les milices territoriales, encadrées par des ultranationalistes d’extrême droite comme ceux du bataillon Azov. Quelle que soit l’issue de cette guerre en cours, les travailleurs d’Ukraine paieront lourdement la transformation de leur pays en bras armé des puissances impérialistes face au dictateur Poutine.

Les impérialistes ne sont jamais venus au secours de quelque peuple que ce soit pour permettre son émancipation. Sans remonter très loin dans le temps, les Irakiens, les Libyens ou les Afghans l’ont cruellement appris à leurs dépens. Les Ukrainiens ne sont même pas à l’abri d’un brusque retournement de leurs parrains occidentaux, capables, s’ils obtiennent un accord gagnant avec Poutine, de les sacrifier après les avoir encouragés à résister. C’est le triste sort qu’ont subi entre autres les Kurdes de Syrie, livrés à l’armée turque après avoir contribué à reconquérir Mossoul pour le compte de la coalition occidentale.