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- Lutte ouvrière n°2783
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Editorial
Vive la lutte des travailleurs de Guadeloupe et de Martinique !
Le ministre des Outre-Mer, Sébastien Lecornu, est aux Antilles depuis dimanche. Son objectif est de déminer la révolte sociale qui a éclaté en Guadeloupe et en Martinique. Car il s’agit bel et bien d’une révolte sociale !
Les médias s’emploient à présenter les événements comme des émeutes fomentées par des bandes de voyous qui ne penseraient qu’à piller, incendier et racketter la population. Exactement comme ils l’ont fait pour le mouvement des gilets jaunes, ils s’attardent sur les violences et passent sous silence les revendications portées par les manifestants.
Qui a pu voir, par exemple, les images de la manifestation de samedi dernier qui s’est déroulée à Pointe-à-Pitre et qui a rassemblé plusieurs milliers de personnes ? Qui a pu entendre les revendications des salariés et de tous ceux, mères de famille, chômeurs, qui se regroupent sur certains ronds-points ? Là, il est non seulement question de l’arrogance du pouvoir et de ses méthodes autoritaires en matière de vaccination, mais aussi du prix de la bouteille de gaz et de celui du pain, de la misère et du chômage.
Ce qui est dénoncé, c’est un pouvoir qui se moque des problèmes de la population. C’est un pouvoir qui a été complice de l’empoisonnement au chlordécone et qui ne bouge pas le petit doigt pour essayer de dépolluer les sols. C’est un pouvoir qui est incapable d’alimenter correctement la population en eau depuis des années.
Installé à 7 000 km, le gouvernement continue de traiter les Antilles comme des colonies et fait des Antillais des citoyens de seconde zone. En Métropole, le taux de chômage est de 8 %, contre 20 % aux Antilles où il y a moins de formations pour les jeunes, moins de lits d’hôpitaux, moins de médecins… Mais, intérêt de la bourgeoisie sucrière oblige, il y a traditionnellement plus de sucre dans toutes les boissons commercialisées, et donc plus de personnes souffrant du diabète ! Tous les prix sont plus élevés aussi, y compris celui des bananes pourtant produites localement.
En résumé, tous les problèmes qui se posent ici aux classes populaires, les petits boulots, les bas salaires et l’inflation, se retrouvent là-bas de façon décuplée.
Cette révolte a les mêmes raisons que celle qui avait débouché en 2009 sur le mouvement contre la « profitation ». Celui-ci avait duré 44 jours, avec de grandes grèves qui avaient mis le pouvoir d’achat au centre des revendications. Eh bien, pour que les classes populaires aient une chance d’arracher l’amélioration de leur vie quotidienne, il faut que les travailleurs en deviennent l’aile marchante !
Pour l’heure, le gouvernement a accordé aux Guadeloupéens ce qu’il avait déjà concédé en Martinique, c’est-à-dire que l’obligation vaccinale ne soit effective qu’au 31 décembre. Il a aussi promis 1000 emplois jeunes. On est loin du compte ! Mais ces petits gestes prouvent que la mobilisation fait bouger les choses. Alors, souhaitons que ceux qui se mobilisent sur les barrages, dans les manifestations et les grèves depuis quinze jours continuent à le faire !
Le ministre des Outre-Mer s’est dit prêt à discuter de l’autonomie. C’est une grossière diversion ! Des notables extérieurs à la révolte populaire et certains indépendantistes peuvent être intéressés par un changement de statut. Mais ni l’autonomie ni même l’indépendance ne feront sortir de la misère les pauvres de Guadeloupe et de Martinique ! L’autonomie ne forcera pas les bourgeois antillais et les békés, héritiers des planteurs esclavagistes, à être moins rapaces vis-à-vis des exploités.
Personne n’est dupe. Si le ministre Lecornu parle aujourd’hui d’autonomie, c’est pour refuser de mettre plus d’argent pour les hôpitaux. C’est pour refuser de mettre les moyens nécessaires dans un plan de réfection du réseau d’eau. C’est pour ne pas parler d’augmentation des salaires et des allocations et de leur indexation sur les prix.
Autonomie ou pas, les travailleurs sont bien placés pour savoir qu’ils ne se feront respecter qu’en se battant pour leurs revendications. Si, depuis 2009, les gains de la mobilisation ont été perdus, c’est que les travailleurs ont baissé la garde quand les patrons, eux, ont continué leur offensive.
Aujourd’hui, les classes populaires des Antilles sont en situation d’inverser le bras de fer parce qu’elles se battent. Pour nous tous ici, cela doit être une source d’inspiration !
Bulletins d’entreprise du 29 novembre