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- Lutte ouvrière n°2772
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TER Marseille-Nice : concurrence, intox et vraies menaces
La région PACA, suite à un appel d’offres, a annoncé l’attribution de l’exploitation de la ligne Marseille-Nice à Transdev à partir de 2025 et pour une période d’au moins dix ans.
Il s’agit, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence des transports ferroviaires, de la première ligne attribuée à un concurrent de la SNCF. Celle-ci avait en effet jusqu’aujourd’hui le monopole du transport de voyageurs sur le réseau ferré national.
Cette annonce est loin d’être une surprise, puisque Renaud Muselier, dirigeant LR de la région PACA, s’y était déclaré favorable bien avant le lancement des appels d’offres. Mais elle a permis à bon nombre de journalistes de déverser leur lot d’âneries et de mensonges. Evidemment, ils ont seriné, comme ils l’ont fait sur BFM, que l’arrivée de la concurrence « vise à faire baisser les prix ». C’était déjà l’argument servi avec l’ouverture à la concurrence du gaz et de l’électricité. On en connaît le résultat : l’explosion du prix de l’énergie, quels que soient les opérateurs. La même chaîne indiquait : « A priori ça fonctionnera, ça a fonctionné dans le fret à partir de 2003, il n’y a aucune raison que ça ne fonctionne pas dans le transport des voyageurs. » En réalité, depuis l’ouverture à la concurrence du fret, ce n’est pas le prix mais le volume de transport de marchandises par rail qui a été divisé par deux ! Enfin, quasiment toutes les chaînes ont chanté les louanges de Transdev, qui « s’est engagé à multiplier par deux les rotations, quatorze par jour au lieu de sept » alors que cette condition figurait dans l’appel d’offres et était donc une condition d’obtention du marché.
Selon la CGT, la région PACA a promis à Transdev 10 millions d’euros de subvention avant même qu’un train ne roule, 50 millions de bénéfices par an pendant les dix ans, et le financement de l’achat de 10 à 12 rames, ainsi que la construction d’un atelier de maintenance, alors qu’un tel atelier existe déjà. L’argent public sera donc mis à contribution pour assurer à Transdev la rentabilité de cette ligne.
Mais derrière l’ouverture à la concurrence, et quel que soit l’opérateur retenu, ce sont d’abord les travailleurs du rail qui sont visés. En effet, à chaque changement d’attribution d’une ligne, les travailleurs concernés, qu’ils soient conducteurs, contrôleurs, ouvriers d’entretien ou agents commerciaux, devront être transférés au nouvel opérateur. Il s’agit pour le patronat du ferroviaire, dont la SNCF est le fer de lance, d’imposer par ce biais un recul considérable des conditions de travail, de rémunérations, de temps de récupération. En PACA ce sont, par exemple, 244 cheminots qui seront transférés à Transdev selon le syndicat Sud-Rail.
Bon nombre de cheminots sont inquiets à juste titre pour leur avenir. Mais se borner à militer pour que la SNCF conserve les marchés est un piège, à plusieurs titres. Tout d’abord, La SNCF, loin d’être une victime, est depuis plusieurs années l’artisan de cette mise en concurrence. Elle a d’ores et déjà annoncé qu’elle postulera aux différents appels d’offres, via des filiales de droit privé, car elle entend déroger de cette façon à sa propre règlementation du travail. Elle a déjà une solide expérience en la matière au travers de sa filiale Keolis, qui exerce le dumping social dans le monde entier tout autant que Transdev, ex-filiale de Veolia, aujourd’hui majoritairement détenue par la Caisse des dépôts et consignations. Autant d’entreprises qui sont en fait à capitaux publics et qui n’en participent pas moins à la déréglementation.
Il faut combattre l’argument seriné par toute la hiérarchie de la SNCF prétendant qu’il faut faire corps avec l’entreprise et accepter les sacrifices pour « conserver le marché ». C’est tout le patronat du transport qui, afin de faire reculer leurs conditions d’existence, veut mettre en concurrence les travailleurs du rail. Quelles que soient leurs entreprises actuelles ou futures, ceux-ci doivent au contraire lutter au coude à coude pour s’opposer à toute dégradation et exiger la garantie d’un emploi et d’un salaire décent pour tous. Les conducteurs de bus de Transdev, actuellement en lutte, montrent l’exemple à suivre.