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Chili : changer la Constitution ou la société ?
Le 4 juillet, l’Assemblée constituante chargée d’écrire la nouvelle Constitution du Chili a élu sa présidente, Elisa Loncon Antileo, une linguiste militante de l’ethnie Mapuche. Elle prétend « transformer le Chili » pour en faire une État plurinational au service du peuple.
Élus fin mai, les 155 membres de cette Assemblée disposent de neuf mois pour rédiger une nouvelle Constitution. À peine commencés, les débats se sont arrêtés pour protester contre une violente répression policière des manifestants exigeant la libération des centaines de prisonniers politiques, détenus sans jugement depuis la proclamation de l’état d’urgence fin 2019.
Elisa Loncon a été mise en avant par les élus des peuples amérindiens, Mapuche, Aymara, Quechua, et a reçu le soutien des élus des coalitions de gauche ( Chile digno où se trouve le PC et Frente amplio ). Elle a donc été élue à une large majorité, car la gauche et les élus indépendants, issus le plus souvent des assemblées réunies pendant la révolte de 2019, représentent une majorité de plus des deux tiers. La droite, le parti du président chilien, sanctionnée par les urnes, impuissante, n’a pu que présenter la présidente comme une radicale intolérante susceptible d’utiliser la violence pour parvenir à ses fins. Venant d’une droite qui n’est pas avare de coups bas et de violences contre la population, cela ne manque pas de sel.
C’est l’actuel président de droite Piñera, un réactionnaire et l’une des principales fortunes du pays, qui a lancé le processus de nouvelle Constitution. Il entendait ainsi mettre un terme à la révolte de 2019 en proposant une solution parlementaire, aussitôt soutenue par la gauche de gouvernement. Celle-ci, en soulignant que la Constitution actuellement en vigueur avait été rédigée sous la dictature de Pinochet, a longtemps attribué tous les maux de la société chilienne à ce chiffon de papier.
Le Chili est l’un des États les plus inégalitaires du monde. La crise sanitaire y a encore amplifié la pauvreté. Alors, comment une nouvelle Constitution pourrait-elle faire que l’État au service exclusif des plus riches puisse se mettre soudain à tenir compte des plus démunis ? Pour mettre fin aux inégalités criantes, il faudrait s’en prendre à la fortune des plus riches, obliger les multinationales à payer pour financer l’éducation, la santé, les retraites, tous secteurs que l’État chilien a abandonnés au privé et indispensables à la population.
Cela, il faudra une lutte déterminée des travailleurs à la tête des classes populaires pour l’imposer, de même que l’ensemble des droits sociaux contestés aux femmes, tels le droit à l’avortement, ou aux peuples autochtones.