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Afrique du Sud : émeutes de la pauvreté
L’Afrique du Sud est secouée par des manifestations qui ont viré à l’émeute depuis le 10 juillet. Après l’appel de l’armée en renfort de la police, la répression a déjà fait plus de soixante-dix morts.
La lutte que se livrent deux clans au sein du parti au pouvoir, l’ANC, a été le détonateur. L’actuel président, Cyril Ramaphosa, et ses soutiens ont écarté il y a plusieurs années leurs rivaux, groupés autour de l’ancien président Jacob Zuma, accusé de corruption. Celui-ci a dû céder sa place à Ramaphosa en 2 018, avant la fin de son mandat. Depuis deux ans, il refuse de répondre aux convocations de la justice, qui a fini par le condamner à quinze mois d’emprisonnement pour outrage.
Après l’arrestation de Zuma, c’est dans la province du KwaZulu-Natal que les manifestations pro-Zuma ont commencé. La route qui relie le port de Durban à Johannesburg, la capitale économique du pays, a été coupée. L’agitation a ensuite changé de nature en gagnant Johannesburg et surtout les banlieues pauvres et très peuplées dont la ville est entourée. Les émeutes ont alors donné lieu à des pillages de commerces, y compris d’alimentation.
Ces anciens townships, tel Soweto, où les Noirs devaient habiter à l’époque du régime raciste de l’apartheid, concentrent toujours la pauvreté. Les problèmes de la population de ce pays, parmi les plus inégalitaires de la planète, y prennent une acuité toute particulière.
Une minorité bourgeoise, traditionnellement blanche et rejointe par quelques riches Noirs depuis l’accession au pouvoir de l’ANC en 1994, accapare toutes les richesses, mais la pauvreté se concentre à l’autre pôle de la société. Ainsi 90 % des foyers noirs ne peuvent pas payer une assurance médicale. Le chômage s’est accru en 2020 et reste depuis à un taux officiel de 32 % : plus de 7,2 millions de travailleurs sont privés d’emploi. Le manque de vaccins anti-Covid a accentué encore cette situation sociale dramatique, qui débouche sur la flambée de révolte actuelle, dont l’agitation pro-Zuma n’a été que le déclencheur.
L’ANC, qui avant d’être au pouvoir représentait un espoir politique pour la classe ouvrière noire, n’offre plus aucune perspective à ceux que la pauvreté pousse à la révolte ; pas plus que le Parti communiste, qui est allié à l’ANC et soutient la répression.
À ce jour, la seule réponse donnée par l’État aux classes populaires est de leur envoyer la police et l’armée.