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Leur société
Crise France-Turquie : concours de démagogie
Samedi 24 octobre, l’ambassadeur de France en Turquie a été rappelé pour consultation, après que le président turc Erdogan a mis en cause la santé mentale de Macron.
Erdogan prétendait ainsi se poser en champion de la défense de l’islam et des musulmans contre Macron qui, lui, se faisait le défenseur du droit à caricaturer Mahomet après l’attentat de Conflans. Le 26 octobre, le président turc a surenchéri en déclarant : « Je m’adresse d’ici à ma nation : surtout ne prêtez pas attention aux marques françaises, ne les achetez pas. » Son appel au boycott des produits français rejoint ceux qui sont faits dans d’autres États du monde musulman, comme le Qatar, le Koweït et l’Arabie saoudite.
En réalité, le véritable enjeu de cette micro-crise diplomatique entre la France et la Turquie se situe bien loin de la défense de la liberté d’expression ou de celle de la religion. La posture affichée par Erdogan lui permet de tenter de faire diversion auprès de sa population, afin de faire oublier une situation économique intérieure catastrophique, avec une inflation galopante. Sa quête de succès sur le terrain de la politique extérieure l’a conduit à envoyer des soldats turcs en Libye, à soutenir l’Azerbaïdjan dans sa guerre au Haut-Karabakh, à déployer des navires militaires en Méditerranée face à la Grèce… Les récentes attaques d’Erdogan contre Macron s’inscrivent dans cette fuite en avant, à la mesure de son discrédit croissant en Turquie.
De son côté, Macron n’est pas mécontent de pouvoir se poser en défenseur intransigeant de la liberté d’expression, à la faveur de cette crise avec la Turquie. Depuis des semaines, avant l’attentat de Conflans et encore davantage après, au fil de discours sur un prétendu séparatisme islamique, de déclarations sur le communautarisme qui commencerait avec les produits hallal dans les rayons des supermarchés, Macron et ses ministres se sont lancés dans une politique de stigmatisation des musulmans qui est le pendant de celle d’Erdogan.
Les motivations des présidents français et turc, qui font mine de se défier, sont en fait similaires : chercher à faire oublier leurs propres responsabilités et celles des classes dominantes dont ils sont les serviteurs dans la crise qui frappe de plus en plus brutalement leur population.