Le monde d’après : livré au capitalisme financier… comme avant19/05/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/05/2703.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Le monde d’après : livré au capitalisme financier… comme avant

Pendant que de bonnes âmes s’interrogent sur le monde d’après et appellent à ce qu’il ne sorte pas de l’épidémie de coronavirus comme il y est entré, c’est-à-dire marqué par des abîmes d’inégalités sociales, menacé par les guerres et les crises environnementales, quelques indicateurs montrent qu’aucun coup de baguette magique ne viendra rendre le capitalisme meilleur et plus raisonnable.

Tandis qu’aux États-Unis 36 millions de travailleurs se sont retrouvés au chômage sur les sept dernières semaines et que les besoins d’aide alimentaire ont explosé, les milieux financiers se sont réjoui que les indices boursiers de Wall Street aient d’abord rebondi de plus de 30 % depuis leur effondrement de la mi-mars. Le S & P 500, qui regroupe les 500 plus grosses entreprises américaines cotées en Bourse, a dépassé fin avril son sommet d’il y a un an, avant de rechuter la semaine suivante et de relancer les inquiétudes sur un nouveau krach. Autant dire que les quelque 3 000 milliards d’aides publiques garanties par l’État fédéral, les rachats par la Fed, la banque centrale américaine, de créances privées dans des montants illimités apportent du carburant aux grandes manœuvres spéculatives des requins de la finance. Ces manœuvres à la hausse ou à la baisse n’ont jamais cessé, en particulier sur une poignée de titres des géants de la technologie, les Gafam, acronyme de Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft.

Mais si, avec la pandémie, les cours des Bourses ont commencé à faire les montagnes russes, par contre une constante du capitalisme continue de se vérifier : celle de l’accumulation de la richesse à un pole et de la misère à un autre. Ainsi, dans les mêmes semaines où des millions de travailleurs se sont retrouvés pris à la gorge par la paralysie de l’économie et où le Covid-19 a provoqué une hécatombe dans les milieux populaires aux États-Unis, les milliardaires américains ont vu leur fortune augmenter de 260 milliards d’euros, une hausse de près de 10 %. Depuis la mi-mars, la fortune cumulée de ces 600 milliardaires était estimée à 2 984 milliards d’euros. Pour comparaison, le PIB de la France pour 2019 était annoncé à 2 400 milliards d’euros.

Parmi les milliardaires qui ont enregistré le bond le plus important de leur fortune, on retrouve des figures des Gafam. La fortune du fondateur et PDG d’Amazon Jeff Bezos a augmenté de 23 milliards d’euros depuis le 1er janvier 2020, celle de son ex-épouse, qui possède 4 % du capital d’Amazon, de près de 7 milliards d’euros. Steve Ballmer, ancien PDG et actionnaire de Microsoft, s’en sort avec près de 2 milliards d’euros supplémentaires.

La crise épidémique met l’économie capitaliste un peu plus au bord du gouffre, mais ceux qui y plongent dès à présent sont les travailleurs et les classes populaires. Les soubresauts des Bourses, l’hypertrophie des fortunes des milliardaires, montrent que la finance continue de danser au-dessus d’un volcan, dans le monde d’après comme elle le faisait dans celui d’avant.

Partager