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Leur société
Sea-Watch : Salvini et Macron, tenants de l’Europe forteresse
Dans la nuit du vendredi 28 juin, la capitaine du navire de l’ONG Sea-Watch, Carola Rackete, après avoir forcé le blocus imposé par les autorités italiennes pour débarquer 42 migrants à Lampedusa, a déclaré : « Nous ne sommes pas soulagés, nous sommes en colère. Ce débarquement aurait dû avoir lieu il y a plus de deux semaines. Les gouvernements européens, dans leurs bureaux climatisés, ont joué avec la vie de ces personnes pendant plus de 16 jours. »
Ce n’est pas la première fois que des migrants se retrouvent otages des politiciens européens de tous bords qui jouent avec leur peau, faisant semblant de s’affronter alors qu’ils sont collectivement responsables de la tragédie qui se joue en Méditerranée.
D’un côté, Salvini, ministre de l’Intérieur italien d’extrême droite, utilise ce débarquement pour sa propagande anti-immigrée et anti-Union européenne. Il est d’ailleurs à l’origine d’une loi adoptée le 14 juin, juste avant l’arrivée du Sea-Watch, qui criminalise les ONG débarquant des rescapés en Italie sans autorisation. Arrêtée et présentée à un juge lundi, Carola Rackete a finalement été libérée.
Mais les dirigeants européens qui critiquent Salvini font preuve d’une hypocrisie non moins révoltante. Pendant des jours, Salvini a refusé que les migrants débarquent sans avoir l’assurance qu’ils seraient transférés aux Pays-Bas, en Allemagne ou ailleurs. Mais la Commission européenne a attendu que le Sea-Watch annonce son intention de forcer le blocus pour dire que certains pays étaient prêts à participer à une répartition… une fois que les migrants auraient débarqué ! Pendant ce temps, l’équipage du navire craignait que certains, à bout de forces, se jettent à l’eau alors qu’ils ne savaient pas nager.
La porte-parole du gouvernement français, Sibeth Ndiaye, a déclaré que le comportement de Salvini n’était « pas acceptable », qu’il pratiquait une « stratégie d’hystérisation sur des sujets très douloureux ». Mais que dire du comportement de Macron ? Celui-ci réaffirmait en avril dernier : « Il faut des frontières, il faut qu’elles soient respectées, il faut des règles. »
L’agence européenne chargée de surveiller les frontières de l’UE, Frontex, créée en 2004, ne cesse d’être renforcée. Le Parlement européen a décidé de constituer un corps permanent de 10 000 gardes-frontières et gardes-côtes d’ici 2027, et le budget de Frontex sera augmenté afin d’acquérir avions et bateaux. Frontex a aussi négocié des accords avec 18 États non membres de l’UE pour qu’ils arrêtent les migrants sur leur territoire. Le gouvernement français a même livré gratuitement six navires à la Libye, où les migrants sont pourtant « enfermés, confrontés au viol, à la torture et à l’esclavage », comme l’avait déclaré Carola Rackete, refusant de ramener à Tripoli ceux que le Sea-Watch avait recueillis.
Plus l’UE tente de fermer ses frontières, plus les itinéraires que les migrants sont obligés de suivre sont dangereux. Salvini comme Macron, et tous les autres dirigeants européens, ont contribué à transformer l’Europe en une forteresse et la Méditerranée en un cimetière.