Contre l’antisémitisme et le racisme : une lutte qui ne peut pas se mener au côté du pouvoir20/02/20192019Journal/medias/journalnumero/images/2019/02/2638.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Contre l’antisémitisme et le racisme : une lutte qui ne peut pas se mener au côté du pouvoir

La bordée d’injures essuyée le 16 février par l’intellectuel réactionnaire Finkielkraut de la part de manifestants en gilets jaunes a été le point de départ d’une opération politique. Le gouvernement et ses porte-parole ont utilisé cet incident pour tenter de discréditer l’ensemble du mouvement des gilets jaunes.

La ficelle, déjà utilisée quelques jours auparavant, est un peu grosse : l’antisémitisme avéré de quelques manifestants ne peut faire oublier les revendications sociales mises en avant par le mouvement, ni la façon à la fois démagogique et répressive dont le gouvernement tente de l’arrêter.

Dans un deuxième temps, on a vu le Parti socialiste embrayer sur la campagne gouvernementale en proposant une manifestation de rue œcuménique pour dénoncer l’antisémitisme. Tous les partis politiques gouvernementaux, les représentants officiels des cultes, les associations plus ou moins représentatives et, évidemment, le président, les ministres, les députés et les sénateurs ont soutenu l’initiative. La presse a alors pu entonner le grand air de l’unité nationale, radios et télévision ont répété, de demi-heure en demi-heure, le rendez-vous de la manifestation. Chaque grande ville a organisé son cortège.

Après quelques hésitations, le parti de Le Pen a été laissé à l’écart, sa filiation avec l’extrême droite antisémite étant un peu trop voyante. Pourtant Finkielkraut lui-même, martyr et héros de cette nouvelle croisade, a regretté qu’un parti représentant tant d’électeurs ne puisse se joindre à l’union nationale. Pourquoi n’y serait-il pas en effet, puisque l’Église catholique et la droite française, qui furent unies contre Dreyfus puis derrière Pétain, et en gardent de beaux restes, y seront ?

Cette manifestation du 19 février, à Paris et dans d’autres villes, comme précédemment celles contre le terrorisme ou contre d’autres exactions antisémites, s’est réduite une fois de plus à une opération politique. Pour ses organisateurs, il s’agissait de démontrer qu’il existe une union nationale derrière quelques « valeurs de la République » qui seraient incarnées par les divers partis de gouvernement et, avant tout, par l’État. Tous les partis tenants de l’ordre, de LR au PCF, ont apporté leur concours intéressé à une telle mise en scène.

Sous le prétexte frauduleux de la lutte contre l’antisémitisme et de la défense des «valeurs républicaines» , le gouvernement et ses soutiens défendent une société de classes et d’oppression, qui nourrit et exsude par tous ses pores préjugés, inculture, arriération, racisme et... antisémitisme.

Le fait même que les puissants, responsables de la misère sociale, fassent de la lutte contre l’antisémitisme un drapeau et l’utilisent pour discréditer un mouvement populaire, peut même contribuer à renforcer encore ce préjugé.

L’antisémitisme ne peut être réellement combattu qu’en contestant le racisme en général et toutes les discriminations, en particulier alors qu’elles viennent de ces gouvernants qui prétendent les combattre.

Heureusement, ce même 19 février, une autre manifestation était organisée dans le quartier parisien de Ménilmontant, à l’initiative de l’Union juive française pour la paix, rejointe par d’autres organisations. Ses initiateurs ont dénoncé la manifestation gouvernementale, en se proclamant juifs et antisionistes. Et en effet, si l’antisémitisme provoque une indignation plus que légitime, elle ne peut pas s’exprimer en manifestant au côté de partis et de gouvernants qui assument la responsabilité de toutes les tares de cette société.

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